Psychologie humaniste et TCA

La psychothérapie humaniste : une approche centrée sur l’humain et le relationnel

La psychothérapie humaniste ne cherche pas la cause des problèmes dans le passé mais comment la personne les entretient sans s’en rendre compte dans le présent au travers de ses pensées et de ses difficultés relationnelles intimes. Dans le cas des TCA notamment, elle ne se concentre pas uniquement sur les symptômes ou les troubles, mais cherche à comprendre et à travailler sur les dimensions relationnelles, affectives et existentielles de l’individu. Cette approche repose sur l’idée que chaque personne possède en elle les ressources nécessaires pour grandir et s’épanouir, à condition de se sentir en sécurité dans une relation authentique et bienveillante avec le thérapeute.

Origines et fondements de la psychothérapie humaniste

La psychothérapie humaniste a émergé au milieu du XXe siècle, dans un contexte où la psychanalyse freudienne et le behaviorisme dominaient le champ de la psychologie. Des psychologues et psychiatres, insatisfaits par ces approches considérées comme trop réductrices ou mécaniques, ont cherché à développer une thérapie plus respectueuse de la complexité humaine.

Parmi les pionniers de la psychothérapie humaniste, on retrouve des figures emblématiques comme Carl Rogers, Abraham Maslow, Rollo May, Fritz Perls, Eric Berne et Jacob Levy Moreno.

Carl Rogers, souvent considéré comme le père de la thérapie centrée sur la personne, a grandi dans une ferme du Midwest américain. Ce contexte rural, loin de l’agitation des grandes villes, l’a sensibilisé très tôt à la nature humaine dans sa simplicité et sa profondeur. Lorsqu’il a commencé sa carrière de psychologue, il s’est vite rendu compte que les patients ne cherchaient pas simplement à être analysés, mais surtout à être compris. Il a alors développé l’idée que l’empathie et l’acceptation inconditionnelle étaient les piliers d’une relation thérapeutique efficace.

Abraham Maslow, quant à lui, est connu pour sa fameuse pyramide des besoins. Ce modèle lui a été inspiré par ses observations sur des personnes qu’il considérait comme pleinement réalisées, telles que des figures historiques ou des artistes. Maslow était fasciné par la manière dont certains individus semblaient atteindre un état de plénitude, malgré les difficultés de la vie. Son travail a permis de déplacer l’attention de la psychologie des troubles vers une psychologie de la réalisation de soi.

Rollo May, influencé par l’existentialisme européen, a apporté une perspective philosophique à la psychothérapie. Ayant traversé des périodes de grande souffrance personnelle, notamment une grave maladie qui l’a forcé à une introspection profonde, May considérait que la vie humaine était marquée par l’angoisse et la responsabilité. Pour lui, la thérapie devait aider les individus à trouver un sens à leur existence, malgré l’absurdité apparente du monde.

Fritz Perls, créateur de la Gestalt-thérapie, était un personnage haut en couleur. D’origine allemande, il a fui le nazisme pour s’installer en Afrique du Sud, puis aux États-Unis. Perls avait une manière très directe et parfois provocante d’interagir avec ses patients. Sa thérapie mettait l’accent sur le moment présent et sur la responsabilité individuelle. Il aimait dire que « la Gestalt, c’est l’art de boucler ses affaires inachevées ».

Eric Berne, fondateur de l’analyse transactionnelle, avait une approche presque ludique de la thérapie. Il considérait que nos relations sociales étaient régies par des transactions entre différents états du moi : le Parent, l’Adulte et l’Enfant. Berne racontait souvent des anecdotes tirées de la vie quotidienne pour illustrer ses théories. Son livre « Des jeux et des hommes » reste une référence accessible et pleine d’humour sur les dynamiques relationnelles.

Jacob Levy Moreno est célèbre pour avoir inventé le psychodrame, une forme de thérapie par la mise en scène. Dès son enfance en Roumanie, Moreno aimait organiser des jeux de rôle avec ses camarades. Plus tard, il a utilisé cette approche théâtrale pour permettre à ses patients d’explorer leurs conflits internes de manière concrète et vivante. Il croyait au pouvoir transformateur de l’action et de l’expression spontanée.

L’une des caractéristiques majeures de la psychothérapie humaniste est l’importance accordée à la relation thérapeutique. Contrairement à d’autres approches où le thérapeute reste distant et neutre, l’approche humaniste valorise une relation d’égal à égal entre le patient et le thérapeute.

Dans ce contexte, le thérapeute n’est pas uniquement un professionnel qui applique des techniques, mais une personne à part entière, avec ses propres limites et sa subjectivité. Cette posture permet de créer un espace où le patient peut se sentir entendu et reconnu dans son expérience unique.

Aujourd’hui, certains psychanalystes adoptent cette posture centrée sur le relationnel, mettant l’accent sur l’importance de la relation pour aider les patients à acquérir une meilleure estime d’eux-mêmes. L’objectif n’est pas de créer une alliance thérapeutique artificielle basée sur la complaisance, mais d’établir une relation authentique, même si elle peut être confrontante.

 

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La différence de l’approche humaniste réside dans la relation thérapeutique confrontante

Dans certains cas, notamment avec des patients souffrant de troubles du comportement alimentaire persistants (TCA), la thérapie humaniste peut adopter une posture plus confrontante. L’objectif n’est pas de contrarier pour contrarier, mais de provoquer une réflexion et d’amener le patient à se positionner. Cette approche permet de travailler sur des problèmes profonds tels que le manque de confiance en soi, l’absence d’estime de soi, ou encore la tendance à interpréter négativement les propos des autres.

Ainsi, plutôt que de chercher uniquement à réconforter, le thérapeute peut adopter une posture plus directe : « Je ne cherche pas une alliance thérapeutique avec vous telle qu’on la cherche habituellement. Je suis une personne, je ne suis pas qu’une psy. » Cette posture permet de créer un espace de dialogue où l’erreur et le désaccord sont acceptés et même encouragés.

En permettant au patient de contester, de critiquer ou d’exprimer son ressenti négatif, le thérapeute offre une opportunité unique au patient : celle de se situer, de prendre conscience de ses émotions et de ses besoins, et d’apprendre à construire une relation plus sécurisante et authentique avec lui-même et les autres.

Dans la psychothérapie humaniste, le travail sur l’estime de soi est central

 De nombreuses personnes, en particulier celles souffrant de troubles du comportement alimentaire comme la boulimie, présentent une faible estime d’elles-mêmes. Elles se comparent sans cesse aux autres, doutent de leurs compétences et ont des difficultés à s’aimer.

Le thérapeute humaniste, en travaillant sur la relation, aide le patient à se voir différemment, à reconnaître ses qualités et ses ressources, et à accepter ses imperfections. Cette reconquête de l’estime de soi passe par des échanges authentiques où le patient apprend à faire confiance à son propre ressenti et à s’affirmer.

La psychothérapie humaniste, avec ses fondements philosophiques et sa posture centrée sur l’humain, offre une alternative puissante aux approches plus classiques de la psychothérapie. En mettant l’accent sur la relation et l’authenticité, elle permet aux patients de se découvrir, de se comprendre et de s’accepter dans toute leur complexité. Que ce soit grâce aux travaux de Rogers, Perls, Berne ou d’autres figures emblématiques, cette approche continue d’inspirer les thérapeutes contemporains, qui voient dans le relationnel une clé essentielle pour accompagner leurs patients vers un mieux-être durable.

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