Boulimie et traumatisme

Boulimie et traumatisme

Dans son dernier livre, «Autobiographie d’un épouvantail» Boris Cyrulnik explique que les enfants blessés

Dans son dernier livre, «Autobiographie d’un épouvantail» Boris Cyrulnik explique que les enfants blessés par des traumatismes graves se sentent des «épouvantails» et parlent d’eux en tant qu’épouvantails : face aux autres ils pensent que leurs interlocuteurs sont des êtres humains mais que eux ne sont qu’une apparence d’être humain.

Cela n’est pas sans évoquer les personnes boulimiques qui se vivent elles aussi comme des épouvantails. Elles peuvent avoir de l’estime pour leurs facultés intellectuelles, mais humainement, elles disent souvent d’elles-mêmes qu’elles ne sont pas « à la hauteur » et qu’elles sont « moins que rien ».

{xtypo_quote_right}Quand on est victime d’une addiction qui vous ruine votre vie, si on ne veut pas faire une carrière de victime, par quoi commencer pour se faire sa place d’être humain?{/xtypo_quote_right}Boris Cyrulnik dans cet ouvrage nous met du baume au coeur : même si on ne se sent personne, on peut apprendre à devenir quelqu’un, à ne pas s’abandonner à la souffrance, à s’en servir pour la transcender . Se découvrant un peu plus que dans ses précédents livres, son message reste toujours le même : face à l’agonie psychique, qu’on en sache la cause ou non, on peut très bien faire une carrière de victime, mais on peut également aussi chercher à se faire une place d’être humain, vers une vie intéressante (même si elle n’intéresse que soi).

Alors comment ne pas faire de carrière de victime quand on est victime d’une addiction qui vous ruine votre vie ? Par où commencer pour se faire une place d’être humain ?

A mon sens, la toute première chose à faire est de se forcer à déculpabiliser. Puisqu’on n’est pas responsable des crises, puisqu’on ne peut pas les empêcher sous peine de souffrir d’obsessions, le premier pas vers le respect de soi, c’est de déculpabiliser et, bien sûr, refuser de se laisser culpabiliser.

Il me paraît ensuite important de ne pas promettre qu’on ne fera plus de crises. Ce n’est pas réaliste sur le long terme et on perdrait la confiance des autres (qui ne comprennent pas que la volonté ne suffit pas).

Enfin la souffrance n’est pas un privilège et il faut éviter de se prendre pour le centre du monde, l’autre n’est pas là pour soulager notre souffrance de même que nous ne sommes pas là pour soulager la souffrance de l’autre. De ce fait on mange comme on veut, on voit qui on veut, on fait ce qu’on veut, en étant attentif bien sûr, à affirmer sa liberté gentiment, sans violence. Inversement, l’autre n’est pas sur terre pour nous faire plaisir et on ne peut pas l’agresser à chaque fois qu’il a un comportement qui nous déplaît.

Le fait de se sentir traumatisé ne donne pas le droit de devenir traumatisant sans quoi, pour le coup, on deviendrait réellement un « épouvantail ».

Catherine Hervais

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