La boulimique et son psy

septembre 2014 psy boulimie

Dans un premier temps, les personnes boulimiques ont tellement honte qu’elles n’osent souvent pas consulter un psychothérapeute. « A quoi bon ! Je suis tellement nulle ! Il suffirait que je réussisse à me contrôler ! Que j’ai plus de courage et de volonté !». Dans un second temps, elles sont tentées de se faire «coacher» par un médecin.

Elles se disent que si elles sont accompagnées, ce sera plus facile. « Toute seule, je finis toujours par craquer. Mais avec quelqu’un que j’irai voir une fois par semaine, j’y arriverai peut-être.» Après un succès en perte de poids parfois spectaculaire mais de courte durée (généralement six mois au plus), elles voient désespérément leurs boulimies revenir en force. {xtypo_quote_right}

« Je suis souvent très à l’aise avec les gens » dit une jeune femme boulimique-anorexique, « mais, au fond de moi, je sais qu’il y a toujours une part de malhonnêteté. »

{/xtypo_quote_right}Dans un troisième temps elles se demandent si, finalement, elles n’ont pas un problème caché dont le comportement alimentaire ne serait que l’exutoire. C’est alors qu’elles se résignent parfois à consulter un «psy». Et là progressivement, dans les séances, émerge le fondement de leur problème: elles ont du mal à être elles-mêmes, elles n’osent pas s’exprimer et, pour peu que le psy leur recommande de ne pas parler de nourriture, elles ne savent plus quoi dire ni comment être.

Au fond de moi, une part de malhonnêteté

Cela rejoint d’ailleurs la manière dont elles sont dans la vie: fuyantes ou décalées. «Je suis souvent très à l’aise avec les gens» dit une jeune femme boulimique-anorexique, «mais, au fond de moi, je sais qu’il y a toujours une part de malhonnêteté».

Ainsi Lolo avec son psy ne joue pas cartes sur table. Elle préfère le quitter plutôt que de lui dire qu’elle ne se sent pas comprise par lui, qu’elle le trouve parfois trop gentil, presque sauveteur et en même temps trop loin de ce qu’elle ressent. Passive dans la relation, elle estime devoir être totalement comprise par lui sans qu’elle ait besoin d’exprimer ce qu’elle ressent.

Dans le même registre, Lucie n’ose pas dire à sa psy combien elle se sent attachée à elle. Elle joue la distance, l’indifférence. « C’est par fierté, elle a trop d’importance pour moi ! Je suis ridicule, je sais, mais ça m’énerve qu’elle ait d’autres patients !».

Quant à Amélie, elle envisage une issue de secours à sa thérapie individuelle en passant à une thérapie de groupe, espérant sortir ainsi de ses retranchements. « Les thérapies de groupe ça a l’air vraiment pas mal» écrit elle dans le forum de boulimie.fr « ça vous oblige à « cracher le morceau» ( le « haricot» comme disent les Anglais), à se lâcher, à ne plus se taire à soi-même et se cacher qui on est vraiment»:

Les unes comme les autres préfèrent fuir plutôt qu’affirmer leurs besoins, leurs envies, leurs difficultés. Elles ne perçoivent pas que c’est la relation avec leur psy qui est à changer et non le psy.

Aborder la boulimie comme un trouble de la personnalité

Pour peu en effet qu’elles choisissent un psy qui accepte d’aborder la boulimie comme un trouble de la personnalité, la psychothérapie leur permettra de surmonter leurs peurs pour s’exercer au jeu de l’authenticité, de l’« honnêteté», de la responsabilité. Un changement pourra alors survenir parce qu’elles se sentiront exister. (Comme nous l’explique dans ses livres Boris Cyrulnik, l’animal humain n’existe vraiment que face à l’autre.). C’est alors, et alors seulement, quand elles se sentiront exister face à l’autre et avec l’autre que les boulimies pourront enfin les lâcher. {xtypo_alert}(1) Psychologue, psychiatre, médecin ou psychothérapeute formés à la psychothérapie. Tous les psychologues, psychiatres et médecins ne sont pas nécessairement formés à la psychothérapie (voir les éditos de janvier 2004: « mon psychothérapeute est-il compétent»). Tous les psychothérapeutes ne sont pas nécessairement formés à la psychopathologie (en particulier les psychothérapeutes « autoproclamés» voir édito Janvier 2004) ou septembre 2004: « la psychanalyse, oui mais…».{/xtypo_alert}

{xtypo_info}Illustration de Nicole Avezard: « Astres à dames». Boulimie.fr vous invite à aller visiter le site de cette peintre pleine d’humour et de fantaisie.{/xtypo_info}

Catherine Hervais

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