Guérir de la boulimie hyperphagie : le professeur Coutanceau explique

Guérir de la boulimie hyperphagie n’est pas une mince affaire. Le monde de la psychiatrie a aujourd’hui compris que ce n’est pas un simple trouble du comportement, mais que l’addiction alimentaire est associée à un manque d’estime de soi. Quand les personnes se plaignent de manger beaucoup trop et de ne pas pouvoir se contrôler, leur médecin de famille ne minimise plus la situation, même si elles sont de poids normal. Et pour ceux qui souffrent de boulimie hyperphagie sans comportements compensatoires et prennent du poids, les encouragements à la volonté seule ne suffisent pas.

L’évolution de la psychiatrie face aux troubles alimentaires. La psychiatrie n’a pas significativement progressé dans sa manière de traiter la boulimie hyperphagie. Elle reconnaît désormais que le manque d’estime de soi n’est pas une conséquence mais plutôt une cause des troubles alimentaires. Les approches initiales ciblant uniquement le comportement alimentaire, bien qu’encore pratiquées, sont désormais complétées par des traitements visant à stabiliser l’humeur grâce à des médicaments comme les antidépresseurs à faible dose.

Le rôle de la psychothérapie et de la psychanalyse. Pour guérir de la boulimie hyperphagie, une psychothérapie adaptée est essentielle, même après la disparition des boulimies. Il reste cependant à déterminer quelle psychothérapie est la plus appropriée, car les personnes souffrant de ces troubles nécessitent souvent une approche plus personnalisée que ce que propose la psychanalyse traditionnelle.

La guérison de la boulimie et de l’hyperphagie exige une approche multidimensionnelle qui tienne compte à la fois des aspects comportementaux, psychologiques et physiologiques. Si certains médicaments offrent une aide précieuse pour gérer les symptômes, ils ne constituent qu’une partie de la solution. La psychothérapie, qu’elle soit individuelle ou en groupe, joue un rôle crucial en aidant les individus à reconstruire leur estime de soi et à développer de nouvelles stratégies pour faire face à leurs émotions et à leurs comportements alimentaires. La sensibilisation et la formation continue des professionnels de santé sont essentielles pour offrir un soutien adéquat aux personnes souffrant de boulimie et d’hyperphagie. En fin de compte, guérir de ces troubles alimentaires est un parcours personnel et complexe, qui nécessite patience, compréhension et un accompagnement thérapeutique adapté.

 

Un professeur en psychiatrie explique :

Si vous visionnez la vidéo dans laquelle le Professeur Coutanceau parlant de son livre, vous verrez que sur la page youtube un internaute commente : « Je suis très étonné. Même choqué… Donc les professionnels psychiatres et psychologues en tête seraient incapables de prendre en charge correctement des anorexiques, boulimiques, les mégalomanes communs, pervers narcissiques et autres « personnalités difficiles »? ».

Je comprends sa colère, et en même temps les psychiatres ne peuvent pas savoir ce qui ne leur est pas enseigné. L’addiction dans son processus psychologique a été assez mal comprise jusqu’ici. Il a fallu les travaux récents de certains psychiatres et surtout de psychanalystes pour faire avancer les choses, notamment pour réussir à guérir de la boulimie hyperphagie.

Parmi eux Bernadette Grosjean3, a co-écrit avec Martin Desseilles un livre sur le trouble de la personnalité borderline qu’elle présente sur une video youtube également. D’une manière générale, par expérience, je constate qu’à ce jour rares encore sont les psychiatres capables de détecter le trouble de la personnalité responsable d’addictions sévères, lorsqu’il n’y a pas une violence manifeste ou un comportement anti-social.

Pour guérir de la boulimie hyperphagie, il faut comprendre ce qu’est une addiction du point de vue psychologique

Pour guérir de la boulimie hyperphagie, bien que la psychanalyse ne soit pas tout à fait adaptée pour les personnalités atypiques qui souffrent de ce problème, il y a eu des écrits remarquables sur la fragilité de certaines personnes hypersensibles qui avaient besoin d’une approche particulière. Du temps de Freud, il y avait Ferenczi, un collègue de Freud, (qui n’était pas avec ce types de patients dans la neutralité mais dans l’authenticité, n’hésitant pas à confronter). Un peu plus tard il y a eu Winnicott qui avait l’avantage d’être aussi pédiatre et qui a observé que certains problèmes d’adultes viennent du temps où ils étaient nourrisson. Encore plus tard le psychanalyste Otto Kernberg (ceux qui comprennent l’anglais peuvent écouter cet extrait vidéo) est devenu célèbre pour avoir décrit un type de personnalité qui n’était ni normal, ni psychotique, ni névrosé, mais avec une identité désorganisée. Et puis bien sûr Joyce Mc Dougall à qui nous devons le concept d’ «addiction» qu’elle a emprunté aux anglo saxons et qui dans un article introduit le concept d’«addiction», avec trois illustration cliniques de patientes boulimiques chez qui elle observe de grosses angoisses de type psychotique. Plus ces angoisses sont précoces dans la vie du sujet et plus difficile sera la construction ultérieure de son identité, explique-t-elle. Installées à un âge trop précoce (et c’est le cas des personnes qui veulent guérir de la boulimie hyperphagie) les angoisses de type psychotique empêchent le sujet d’accéder à un sentiment de soi.

Parmi les psychanalystes d’aujourd’hui je voudrais également citer Jean-Michel Fourcade qui, dans son livre,1 explique que les caractéristiques de ces personnalités s’expriment à travers l’excès et le manque. « Tout se joue entre le « normal » et le ‘trop’, entre l’émotion et la «surémotion»?, entre la mesure et la démesure »2.

Mais comprendre n’est pas faire. Une chose est sûre selon le Professeur Coutanceau: il faudra changer la manière de faire de la psychothérapie. Les personnes qui souffrent de troubles d’identité ont besoin d’un psychanalyste qui ne soit pas neutre pour favoriser les apprentissages cognitifs et relationnels.

« Selon moi », dit-il « dans une dynamique de changement, la psychothérapie et l’éducation doivent s’ajouter, se compléter, s’amalgamer.»6

Personnellement et par expérience avec ce type de personnalité, je trouve que la psychothérapie inensive en groupe permet justement à la fois de se comprendre elles-mêmes et aussi d’apprendre, par des échanges authentiques relationnels, à devenir soi-même parmi les autres, sans violence et sans ressentir le besoin de fuir.

Je vous invite à vous reporter pour plus d’information aux articles dans lesquels j’ai déjà développé la description de cette approche nouvelle.


1. « Troubles de la Personnalité, ni psychotiques, ni névrotiques, ni pervers, ni normaux», publié en collaboration avec Joanna Smith, éditions Dunod, 2013
2. Les personnes qui ont une addiction alimentaire n’ont pas toujours de difficulté dans leur famille ni dans les institutions parce que, contrairement aux produites toxiques la nourriture n’altère pas leurs capacités intellectuelles.
3. « Le manuel du Borderline” Broché, editions Eyrolles– 23 janvier 2014
4. « Les personnalités limites: Hypersensibilités, à fleur de peau, ecorchés vifs … Tous borderlines ? » (ed. Eyrolles). Jean Michel Fourcade a crée une école de formation de très bonne réputation dans lequel enseignent des cliniciens expérimentés : la Nouvelle Faculté Libre (NFL)
5. Ed. Eyrolles, 2011, 188 p., 18,20 euros. Il est aussi le fondateur de la Nouvelle Faculté libre(NFL), formant à la psychothérapie et à la psychanalyse intégrative. www.nflpsy.fr
6. « Faut il être normal », ed Dunod, page 130.

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