Pour soigner une addiction, la psychiatrie grâce aux antidépresseurs et aux anxiolytiques apportent un support parfois nécessaire, mais c’est la psychologie centrée sur la personne, qui transforme en profondeur.
Dans cet article, nous tenterons de comprendre :
• L’exploration et l’expression des émotions
• La redécouverte de l’identité et de la valeur personnelle
• Le remplacement des comportements destructeurs par une méthode pour acquérir de l’estime de soi
• La consolidation de la résilience
Explorer et exprimer les émotions : la voie de la transformation
L’addiction, loin d’être un simple défaut de volonté ou une faiblesse morale, se révèle souvent être le symptôme d’une souffrance profonde, une angoisse identitaire silencieuse ou un conflit interne que la personne ne parvient pas à nommer. Elle est un « vertige intime », une tentative désespérée de réguler un mal-être, de trouver un refuge illusoire face au vacarme du monde ou à un vide intérieur. Dans cette quête, l’expression des émotions refoulées devient une clé essentielle pour toute transformation psychique.
Les grands cliniciens ont depuis longtemps mis en lumière cette nécessité. Donald Winnicott, pédiatre et psychanalyste britannique, nous a offert le concept précieux d’« espace potentiel ». Pour lui, cet espace est un lieu psychique sacré, entre l’individu et son environnement, où il devient possible de jouer, de créer, d’explorer, et ainsi de donner forme à ce qui ne peut être dit par les mots. Dans le contexte de l’addiction, la substance ou le comportement compulsif peut paradoxalement investir cet espace, offrant un sentiment de sécurité temporaire.
Le travail sur soi, loin du cabinet du thérapeute, consiste alors à réinvestir cet espace autrement, à canaliser l’angoisse par des voies créatives. C’est en écrivant, en peignant, en écoutant ou en faisant de la musique, en pratiquant un sport, ou simplement en s’engageant dans une réflexion profonde, que l’on donne une forme nouvelle à la souffrance, permettant de se réapproprier son histoire.
Prenons le cas de Julie, 27 ans, prisonnière d’une addiction aux jeux vidéo. Entre ses séances, sa psychologue l’a encouragée à explorer ses émotions à travers le dessin et la peinture. Au début, l’exercice semblait étrange, mais peu à peu, Julie a commencé à esquisser ses peurs, ses frustrations, sous forme de personnages sombres ou de paysages chaotiques. Progressivement, cette activité artistique est devenue pour elle un véritable espace potentiel. Elle a découvert qu’elle pouvait, par la création, mettre à distance son anxiété, mieux cerner les déclencheurs de sa compulsion, et ressentir un contrôle inédit sur son propre monde intérieur. L’art, pour Julie, est devenu un puissant substitut à la compulsion, une porte vers la transformation et la découverte d’un soi plus authentique.

Dans cette même perspective, Carl Rogers, figure emblématique de l’approche centrée sur la personne, a révolutionné notre compréhension de la psychothérapie en plaçant l’acceptation inconditionnelle de soi au cœur du processus de changement. Pour Rogers, la bienveillance et l’absence de jugement de la part du thérapeute sont des conditions sine qua non pour que le patient puisse s’accepter pleinement. Ce chemin vers l’acceptation de soi est un acte continu, que Rogers encourageait ses patients à poursuivre entre les séances. Tenir un journal intime, pratiquer la méditation, ou simplement s’accorder des moments de réflexion silencieuse, sont autant de pratiques qui aident à reconnaître et à nommer les émotions, à s’en libérer plutôt qu’à en être prisonnier, et à briser le cercle vicieux de la répétition addictive.
C’est ce que Marc, 42 ans, aux prises avec une dépendance à l’alcool, a expérimenté grâce au journal thérapeutique. Sa thérapeute lui a suggéré de noter quotidiennement ses émotions, ses envies de consommer, et les situations qui les déclenchaient. Rapidement, Marc a identifié un schéma : ses crises survenaient souvent après des conflits familiaux ou des échecs professionnels. En mettant des mots sur ses ressentis, il a commencé à anticiper les situations à risque et à développer des stratégies alternatives : une longue marche, un appel à un ami, des exercices de relaxation. Le journal n’était plus une simple consigne, mais un compagnon de route silencieux, un espace de dialogue intime qui lui permettait de se comprendre et d’agir différemment.
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Quant à Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, il a posé les fondations d’une compréhension psychodynamique de l’addiction. Pour Freud, le symptôme addictif est une tentative de compromis, un moyen pour le psychisme de gérer des forces inconscientes opposées. Le travail analytique vise à « rendre conscient l’inconscient », à éclairer le sens caché des actes et des souffrances. Cette démarche, initiée en séance, peut être poursuivie à domicile par des exercices d’introspection, d’association libre, ou des activités créatives, cherchant à relier les comportements présents à des expériences passées, souvent enfouies.
Sophie, 34 ans, confrontée à une addiction au shopping compulsif, a été invitée par sa psychanalyste à pratiquer l’association libre à domicile. Chaque soir, elle écrivait sans filtre tout ce qui lui venait à l’esprit concernant ses achats, ses envies, mais aussi des souvenirs lointains de son enfance. Ce flot de pensées, mis sur papier, a progressivement révélé un lien surprenant : ses pulsions d’achat survenaient après des disputes avec sa mère, réactivant un sentiment d’abandon ancien. Cette prise de conscience, fruit d’un travail personnel acharné, a marqué le début d’un profond processus de réparation et de transformation.
L’expression des émotions, qu’elle passe par l’art-thérapie, l’écriture, la parole ou la simple introspection, est un levier puissant de transformation. Elle permet au patient d’apprendre à reconnaître ses signaux d’alerte, à anticiper ses moments de vulnérabilité, et à mobiliser des ressources internes et externes. Ce processus, bien que lent et parfois douloureux, est la condition d’un changement durable, offrant une voie pour survivre à l’intensité émotionnelle sans recourir à l’addiction.
Découvrir son identité et sa valeur : le socle de l’estime de soi
L’addiction est une maladie insidieuse qui, au-delà de ses effets physiques, tend à éroder et effacer l’identité propre de l’individu. La personne finit par se définir presque exclusivement par son comportement compulsif, perdant de vue ses multiples facettes, ses compétences uniques, ses désirs profonds, et ce qui faisait sens pour elle avant l’emprise de la dépendance. Pour briser ce cercle d’effacement, il devient impératif de se réapproprier qui l’on est, indépendamment de l’addiction qui a usurpé la place centrale. Ce travail identitaire constitue le cœur même de la construction d’une estime de soi solide et durable.
Erik Erikson, célèbre pour sa théorie des stades du développement psychosocial, a magistralement démontré que la construction de l’identité n’est pas un processus figé dans l’enfance, mais une œuvre continue qui se poursuit tout au long de la vie. Les crises identitaires, loin d’être des faiblesses, sont en réalité des moments de remaniement nécessaires, des opportunités de redéfinition de soi. Dans le contexte de l’addiction, la compulsion peut être perçue comme une tentative maladroite de résoudre une crise identitaire non aboutie. Entre les séances, le travail sur soi invite à une introspection profonde : à interroger ses valeurs oubliées, à réévaluer ses choix, à oser rêver à nouveau. Il s’agit de se souvenir de ce que l’on aimait avant que l’addiction ne prenne le dessus, d’explorer de nouvelles expériences, et de renouer avec des activités jadis délaissées.
Pierre, 38 ans, un ancien sportif de haut niveau, a développé une addiction au travail après un licenciement brutal, cherchant à combler le vide laissé par la perte de son identité professionnelle. Sa psychologue l’a encouragé à renouer avec ses passions d’enfance. Pierre a ressorti son vieux vélo, a commencé à s’entraîner, puis à participer à des courses locales. C’est sur les routes de campagne qu’il a redécouvert un sentiment de fierté, un plaisir pur de l’effort, et un sentiment d’appartenance à une communauté, loin des exigences et des déceptions du monde professionnel. Cette redécouverte de soi, ancrée dans une passion authentique, l’a aidé à reconstruire une identité plus riche, plus stable, et profondément indépendante de son ancienne compulsion.
Viktor Frankl, psychiatre autrichien et fondateur de la logothérapie, a survécu aux horreurs des camps de concentration nazis, d’où il a tiré une conviction inébranlable : la quête de sens est le moteur le plus puissant du changement humain. Pour Frankl, un individu peut endurer toutes les épreuves s’il trouve un sens à sa vie. La perte de sens est souvent au cœur de l’addiction. Entre les séances, se consacrer à réfléchir à ce qui donne du sens à son existence, coucher sur papier ses objectifs, s’investir dans des projets qui transcendent l’intérêt personnel, sont autant de démarches qui permettent de reconstruire une identité plus forte et un goût de vivre retrouvé.
Fatima, 29 ans, luttait contre une dépendance au cannabis, cherchant à fuir une existence qu’elle jugeait vide de sens. Son thérapeute lui a proposé une voie inattendue : s’engager comme bénévole dans une association d’aide aux sans-abri. Au milieu des plus démunis, Fatima a découvert une nouvelle facette d’elle-même : elle pouvait être utile, appréciée, et elle possédait des compétences relationnelles et organisationnelles qu’elle ignorait. Cet engagement lui a redonné confiance, a structuré son temps, et a offert un nouveau sens, concret et gratifiant, à son existence, la détournant progressivement de sa dépendance.
Ce travail de réappropriation identitaire est intrinsèquement lié à la construction de l’estime de soi. Nathaniel Branden, psychologue américain de renom, a dédié sa carrière à l’étude approfondie de l’estime de soi. Il a souligné que l’estime de soi n’est pas un concept abstrait que l’on décrète, mais une construction progressive, pas à pas, nourrie par des expériences de réussite, le respect de soi, et une cohérence grandissante entre ses actes et ses valeurs profondes. Entre les séances, chaque petite victoire, chaque engagement tenu, chaque moment de lucidité sur soi-même, vient enrichir ce sentiment de valeur personnelle. Il s’agit de dresser l’inventaire de ses qualités, de ses ressources, de ses réussites, même les plus modestes. Prendre soin de soi, s’accorder du temps pour des activités nourrissantes, se féliciter de ses progrès, sont des gestes simples mais d’une puissance immense pour restaurer une estime de soi malmenée par l’addiction.
Lucie, 24 ans, souffrait de boulimie, ses crises étant souvent liées à un sentiment de dévalorisation. Sa thérapeute lui a suggéré de tenir un « carnet des réussites ». Chaque soir, Lucie devait y noter une action dont elle était fière, aussi infime soit-elle : avoir résisté à une pulsion, avoir appelé une amie au lieu de manger, ou simplement avoir pris le temps de prendre soin d’elle. Ce travail quotidien, mené avec diligence entre les séances, a progressivement renforcé son estime de soi, la rendant plus forte face aux crises et diminuant leur fréquence.
Enfin, Albert Bandura, psychologue canadien et figure majeure de la psychologie sociale cognitive, a introduit la notion capitale d’auto-efficacité. Il s’agit de la croyance de l’individu en sa propre capacité à organiser et exécuter les actions nécessaires pour atteindre un objectif donné. Bandura a démontré que cette conviction interne est un moteur puissant de changement, un antidote à la passivité et à la dépendance.
Thomas, 31 ans, aux prises avec le jeu pathologique, a appris avec son psychologue à se fixer des objectifs réalistes et atteignables. Il a commencé par des actions concrètes : limiter ses dépenses quotidiennes, éviter les lieux de jeu à risque, s’inscrire à de nouvelles activités alternatives. Chaque objectif atteint, aussi petit fut-il, a renforcé sa confiance en sa capacité à agir et à reprendre le contrôle de sa vie, l’encourageant à poursuivre ses efforts avec une détermination nouvelle.
La redécouverte de l’identité et la restauration de l’estime de soi ne sont pas des concepts abstraits ; elles se vivent à travers des actions concrètes, des réflexions profondes et un engagement personnel. Elles permettent au patient d’explorer ses valeurs, de renouer avec ses passions, de s’engager dans des actions positives, et ainsi de reconstruire une identité solide, libérée de l’emprise de l’addiction.
Remplacer les comportements destructeurs : de la compulsion à la création
L’addiction n’est pas qu’une simple échappatoire ; c’est aussi, et de manière significative, une tentative, bien que dysfonctionnelle, de régulation émotionnelle. C’est un moyen illusoire de retrouver un sentiment de contrôle sur un monde intérieur ou extérieur perçu comme chaotique, ou de combler un vide existentiel. Pour véritablement transformer cette énergie compulsive en une force créatrice et constructive, il est impératif de proposer des alternatives concrètes, gratifiantes et accessibles, qui puissent offrir une satisfaction plus profonde et plus durable.
Aaron T. Beck, le psychiatre américain fondateur de la thérapie cognitive, a mis en évidence le rôle central des schémas de pensée. Il a montré que nos comportements découlent souvent de pensées automatiques, fréquemment négatives ou déformées. Le travail thérapeutique, en particulier entre les séances, consiste à identifier ces schémas, à les remettre en question, et à expérimenter de nouveaux comportements. Par exemple, quand on est en colère contre quelqu’un, convoquer la philosophie basique de la vie quotidienne, qui nous dit que l’autre ne nous doit rien et que Par exemple, quand on est en colère contre quelqu’un, convoquer la philosophie basique de la vie quotidienne, qui nous dit que l’autre ne nous doit rien et que Par exemple, quand on est en colère contre quelqu’un, convoquer la philosophie basique de la vie quotidienne, qui nous dit que l’autre ne nous doit rien et que lui et moi ne sommes pas dans la même planète, chacun de nous 21 univers à partchacun de nous 21 univers à part
Sophie, 36 ans, luttait contre une addiction à l’alcool et se sentait impuissante face à ses « cravings ». Sa thérapeute l’a initiée à la restructuration cognitive. La psychothérapie cognitive lui a appris à repérer les pensées automatiques qui accompagnaient l’envie de boire, comme « Je ne tiendrai jamais sans boire » ou « Un seul verre ne fera pas de mal ». Petit à petit, la psychothérapie cognitive lui a appris elle a appris à remplacer ces pensées par des affirmations alternatives plus aidantes : « Je peux essayer une autre stratégie » ou « L’envie est temporaire, je peux la traverser ». Mais ça n’a marché qu’un temps. Lorsqu’elle a fait une psychothérapie centrée sur la personne et non le comportement elle a appris À se méfier de ses pensées négatives concernant elle-même, la vie, les autres et petit à petit en travaillant le, non jugement et les parvenue à acquérir non seulement un sentiment de soi, mais en plus de l’estime de soi. L’estime de soi est un sentiment tellement jouissif qu’il compense la douleur des frustrations. C’était une psychothérapie de Groupes. Sa vie changea petit à petit entre les séances jusqu’à ce qu’elle prenne plus de plaisir dans la relatin au autres que dans la boisson. C’est ce qui lui a permis de découvrir avec étonnement qu’elle pouvait faire face à l’envie sans y céder.
Mihály Csíkszentmihályi, psychologue hongro-américain, a popularisé la notion de « flow », cet état d’immersion totale, de concentration intense et de plaisir profond dans l’action, où le temps et les soucis s’estompent. Rechercher et cultiver des expériences de flow – que ce soit dans le sport, l’art, le bricolage, la lecture, ou toute autre activité engageante – offre une forme de satisfaction intrinsèque, une joie profonde et sans danger pour soi. Malheureusement, tout le monde n’a pas la chance de trouver des actions qui leur donne envie de bouger. Dans ce cas il est important de s’écouter quitte à passer le temps devant des séries B. Tout vaut mieux que l’ennui pour le mental quand on a une personnalité borderline.
Antoine, 22 ans, avait fait du cannabis son principal exutoire et sa source de plaisir. Son premier thérapeute lui a suggéré d’explorer d’autres avenues pour canaliser son énergie et trouver du sens. Antoine, passionné de musique depuis l’adolescence, a commencé à composer, à enregistrer ses morceaux, et à les partager en ligne. Il a découvert alors des moments de « flow » intenses, une satisfaction profonde issue de la création, de la reconnaissance de ses pairs, et de la connexion avec son public. Mais ça n’a pas duré. Son second thérapeute ne lui a rien demandé quant à des changements concernant son addiction. Mais dans les groupes de parole il a découvert le plaisir de la présence à l’autre et inversement. Il s’est rendu compte que le cannabis l’enfermait dans une bulle et ne lui permettait pas de faire des vraies rencontres. Il a facilement renoncé au canabis qui l’isolait des autres et n’a pas eu trop de mal à accepter la frustration de ne plus en prendre parce que le charme du contact authentique à l’autre est encore plus « plannant ».
Le remplacement des comportements destructeurs passe également par le développement de compétences sociales et interpersonnelles. Albert Ellis, pionnier de la thérapie rationnelle-émotive, insistait sur l’importance de l’affirmation de soi, de la capacité à demander de l’aide, et à dire non. S’entraîner à ces habiletés, même dans des situations simples et quotidiennes, permet de renforcer la confiance en soi et de réduire la vulnérabilité à la tentation de l’addiction, souvent liée à un manque d’assertivité ou à la peur du jugement.
Enfin, le soutien du groupe, qu’il soit formellement thérapeutique ou informel (comme les groupes d’entraide), joue un rôle déterminant dans ce processus de remplacement et de transformation. Irvin D. Yalom, psychiatre et psychothérapeute américain, pionnier de la thérapie de groupe, a montré que le groupe offre un miroir bienveillant, un espace de soutien inestimable, et une source d’inspiration mutuelle. Partager ses difficultés, écouter les expériences des autres, recevoir des encouragements et des retours constructifs, permet de briser l’isolement souvent associé à l’addiction et de se sentir moins seul face au défi.
Daniel, 35 ans, confronté à une addiction chronique à l’alcool, avait connu plusieurs échecs en thérapie individuelle. Sur les conseils de son médecin, il a rejoint un groupe de parole. Là, il a découvert qu’il n’était pas seul à lutter, que d’autres partageaient ses peurs, ses espoirs, ses rechutes et ses victoires. Les échanges, les témoignages, les encouragements mutuels l’ont aidé à relativiser ses propres échecs, à célébrer ses progrès, et à apprendre des stratégies de coping utilisées par d’autres. Le groupe est devenu un pilier fondamental de son rétablissement, un lieu où il pouvait être lui-même, vulnérable et fort à la fois.
Le remplacement des comportements destructeurs par des alternatives constructives, créatives, sociales ou aidées par la technologie, est un levier essentiel du changement. Il permet au patient d’expérimenter de nouvelles voies, d’ajuster ses stratégies, et de consolider des habitudes durables, transformant ainsi l’énergie de l’addiction en une force de vie.
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Consolider la résilience et prévenir les rechutes : vers une estime de soi durable
La transformation d’une addiction en une estime de soi solide et durable est un chemin exigeant, qui ne s’accomplit pas en un jour. Ce processus demande une persévérance inébranlable, une profonde bienveillance envers soi-même, et surtout, la capacité à tirer des leçons de ses échecs, à les considérer non pas comme des capitulations, mais comme des étapes nécessaires à l’apprentissage. Dans cette quête, les notions de résilience et d’auto-compassion, mises en lumière par des cliniciens contemporains, sont fondamentales.
Boris Cyrulnik, neuropsychiatre français de renom, a largement contribué à populariser le concept de résilience. La résilience n’est pas un don inné, mais une capacité, une compétence qui se construit au fil du temps et des épreuves : cette faculté à rebondir après l’adversité, à transformer la souffrance en une force motrice. Entre les séances, la consolidation de la résilience passe par une acceptation radicale des rechutes, non comme des échecs définitifs qui annulent tous les progrès, mais comme des informations précieuses. Il s’agit d’analyser les circonstances de la rechute, d’identifier les déclencheurs sous-jacents, et d’ajuster les stratégies pour l’avenir.
Tenir un carnet de bord, y noter ses progrès comme ses difficultés, ses émotions, ses réflexions, permet de maintenir le cap et de mesurer le chemin parcouru, même minime.
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Marie, 45 ans, ancienne alcoolique, portait le poids de ses années de dépendance comme une honte insurmontable, se percevant uniquement comme une victime de son passé. Avec son thérapeute, elle a entrepris un travail profond de narration de son histoire, mais sous un angle nouveau. Elle a appris à mettre en lumière ses réussites, même les plus petites, ses ressources internes qu’elle avait mobilisées, et les moments où elle avait su résister à la tentation, même si la rechute avait suivi. Ce processus de réécriture de son récit de vie lui a permis de se percevoir non plus comme une victime impuissante, mais comme une survivante, une femme forte et résiliente, renforçant ainsi sa confiance en sa capacité à surmonter les épreuves futures.
L’estime de soi durable se construit également dans la durée, par l’accumulation de ces petites victoires quotidiennes.
Chaque jour passé sans addiction, chaque moment de lucidité face à l’envie, chaque choix aligné avec ses valeurs nouvellement (re)découvertes, vient nourrir et renforcer ce sentiment de compétence et de cohérence intérieure. Comme le souligne Christophe André, psychiatre français et éminent spécialiste de la méditation de pleine conscience, la pratique régulière de l’auto-compassion, de la gratitude et de la pleine conscience est un pilier essentiel pour cultiver une relation apaisée et bienveillante avec soi-même.
Bibliographie
- Winnicott, Donald W.
Jeu et réalité. L’espace potentiel
Gallimard, 1975 (rééd. 2022, Folio Essais) - Rogers, Carl
Le développement de la personne
Dunod, 2005 (rééd. 2021) - Freud, Sigmund
Nouvelles conférences d’introduction à la psychanalyse
Payot, 1932 (édition de référence) - Erikson, Erik H.
L’identité, la jeunesse et la crise
Flammarion, 1972 (rééd. 2023) - Frankl, Viktor E.
Découvrir un sens à sa vie avec la logothérapie
InterÉditions, 2017 - Branden, Nathaniel
Les six piliers de l’estime de soi
Éditions Leduc, 2021 (traduction française) - Bandura, Albert
Self-Efficacy: The Exercise of Control
W.H. Freeman, 1997 - Beck, Aaron T.
Prisonniers du passé : Survivre à la dépression
Odile Jacob, 2000 - Csíkszentmihályi, Mihály
Vivre : La psychologie du bonheur
Robert Laffont, 2006 (rééd. 2022, Pocket) - Ellis, Albert
Comment ne pas gâcher sa vie
InterÉditions, 2009 - Yalom, Irvin D.
Le jardin d’Épicure : récit d’une psychothérapie
Albin Michel, 2021 - Cyrulnik, Boris
Le Laboureur et les mangeurs de vent. Liberté intérieure et confortable servitude
Odile Jacob, 2024 - André, Christophe
Consolations. Celles que l’on reçoit et celles que l’on donne
L’Iconoclaste, 2023