Winnicott adaptait la psychanalyse face à une personnalité atypique

Psychanalyse et boulimie 

La boulimie, un trouble alimentaire profondément complexe, a souvent été un défi pour les thérapeutes. Alors que certaines approches échouent, la psychanalyse, en particulier l’approche de Winnicott, offre une lumière d’espoir. Cet article plonge dans cette relation unique et la manière dont elle peut transformer la vie des patients.

La psychanalyse et la boulimie sont intimement liées, car la psychanalyse permet de comprendre les processus psychologiques impliqués. Lorsque d’autres approches thérapeutiques échouent, une thérapie d’inspiration psychanalytique peut être recommandée, offrant une compréhension approfondie du trouble de l’identité chez les personnes boulimiques.

La psychanalyse a les clefs pour comprendre

Comme le disait le docteur Olievenstein, spécialistes du traitement des toxicomanes à Jacques Lacan, son ami psychanalyste:  « La psychanalyse a tout compris sur la personnalité des drogués chroniques et pourtant elle ne peut pas les aider » de mais la psychanalyse ne peut convenir aux personnalités addictives ». Psychanalyse et boulimie sont indissociables pour comprendre la boulimie au sens ou la psychanalyse permet d’accéder aux processus psychologiques impliqués dans cette addiction. Généralement, quand la thérapie cognitivo-comportementale (carnet alimentaire, contrôle sur les boulimies etc…) échoue et que les personnes boulimiques ne réussissent pas à venir à bout de leurs crises, celles-ci se voient orientées vers une thérapie d’inspiration psychanalytique qui a, en France, la réputation d’aller vraiment au fond des choses.

Mais comprendre ne suffit pas

Mais leur trouble de l’identité est si profond, si archaïque quand il s’agit d’addiction alimentaire, que la psychanalyse en tant qu’approche thérapeutique permet de déculpabiliser, ce qui est déjà beaucoup sans permettre d’avancer suffisamment pour les gens parviennent un jour à se sentir vraiment à l’aise parmi les autres. Déculpabiliser aide à souffrir un peu moins, mais, dans sa manière habituelle de fonctionner (neutralité du psychanalyste), l’approche freudienne n’est pas adaptée pour traiter les troubles de la personnalité. Pour qu’elle soit adaptée, il faudrait qu’elle sorte totalement de son cadre thérapeutique : le psychanalyste ne serait pas neutre (mais impliqué dans la relation) et les séances individuelles ne dureraient pas entre une demi heure et quarante cinq minutes mais une heure et demi.

Comment la psychanalyse Margaret I Little s’en sort avec une psychanalyse adaptée. à son type de personnalité 

Dans l’histoire qui va suivre vous verrez comment le psychanalyste Winnicott a tout axé sur le relationnel, avec sa patiente, Margaret I Little, ainsi qu’elle l’a raconté dans le récit de son analyse avec lui. J’ai choisi, dans cet éditorial, de vous raconter l’histoire de ce psychanalyste qui a su réinventé la psychanalyse pour cette patiente et improviser un accompagnement suffisamment nourricier pour que sa patiente, porteuse d’un trouble « borderline » de la personnalité et accessoirement d’une addiction alimentaire, puisse dépasser sa peur de vivre et se construire une vie enfin paisible.

C’est une histoire magnifique racontée par la patiente elle même, Margaret I Little, une femme médecin de quarante huit ans qui allait devenir psychanalyste par la suite . Margaret I Little sentait bien que sa précédente analyse n’avait pas touché les couches les plus profondes de son identité et en particulier sa peur d’exister.

Elle elle ne se sentait pas « quelqu’un »; Je voulais « être quelqu’un », c’est à dire une vraie personne, et non pas personne, ou une non-personne ». Pour elle, la sexualité ne pouvait qu’être hors de propos et sans signification aucune. Elle choisit comme troisième psychanalyste un homme dont elle pressentait qu’il allait pouvoir l’accompagner dans les zones les plus archaïques de sa personnalité..

Winnicott, ce troisième analyste, avait été pédiatre auparavant et c’est sans doute la raison pour laquelle il savait voir dans l’adulte les carences du nourrisson, en deçà de toute sexualité, à laquelle renvoie toujours la psychanalyse. Là où les psychanalystes ont appris à se taire pour mieux renvoyer l’autre à lui-même, Winnicott a su pousser cette femme qui se sentait si inexistante à exister suffisamment pour entrer en contact avec lui.

Margaret I Little était peut-être boulimique dans la mesure ou elle racontera plus tard qu’avant ses séances elle se gavait dans une épicerie. Toutefois, quand elle exerça elle-même son métier de psychanalyste, elle allait écrire un livre sur l’addiction alcoolique. Margaret raconte sa première séance qui pour elle produisit une répétition de la terreur. « J’étais couchée, roulée en boule, complètement cachée sous la couverture, incapable de faire un mouvement ou de dire un mot. D.W. (Winnicott) garda le silence jusqu’à la fin de la séance puis se contenta de dire : « Je ne sais pas, mais j’ai l’impression que, pour une raison que j’ignore, vous me tenez à l’écart ».

Tout doucement, sur la pointe des pieds, il était en train de lui dire : « nous sommes deux ici, vous n’existez peut-être pas encore, mais moi, j’existe déjà et je ne me sens pas pris en compte par vous ». Un autre jour, pendant toute une séance, elle fut saisie de spasmes de terreur. Elle lui attrapa les mains, s’y accrocha et il les lui laissa jusqu’à la fin des spasmes. Pendant quelques minutes, même il lui tint la tête comme il aurait tenu la tête d’un bébé à sa naissance. Elle ne s’y trompa pa : il s’agissait bien pour elle de la naissance d’une véritable relation à l’autre.

La créativité du psychanalyste Winnicott avec une patiente hors du commun

La sollicitude de Winnicott pour sa patiente alla même encore plus loin. Se rendant compte qu’il ne se passait presque rien pendant la première moitié de chaque séance parce qu’il fallait beaucoup de temps à Margaret pour trouver du calme en raison de l’environnement très perturbant de son enfance, il prolongea la durée de la séance à une heure et demie, sans changer ses honoraires, et ce, jusqu’à la fin de son analyse.

Selon Winnicott un bébé devait être maintenu par sa mère avec sécurité pour pouvoir se développer harmonieusement et il recréa avec Margaret le maintien dont elle avait manqué, pour lui offir un nouveau « début » de vie. « Littéralement, il tenait mes deux mains serrées entre les siennes pendant de longues heures, presque comme un cordon ombilical, tandis que moi j’étais allongée, souvent cachée sous la couverture, silencieuse, inerte, renfermée, paniquée, enragée, ou en larmes, endormie et quelque fois rêvant. « En fait, Winnicott offrait sa propre force au patient et il la retirait à mesure que le patient devenait capable de la puiser en lui-même.

Bien que la psychanalyse puisse déculpabiliser et soulager les souffrances liées à la boulimie, elle ne convient pas toujours aux troubles de la personnalité profondément enracinés. Cependant, certains psychanalystes, comme Winnicott, ont su adapter leur approche pour répondre aux besoins spécifiques des patients boulimiques, offrant ainsi une nouvelle perspective thérapeutique basée sur la relation et l’attachement.

La boulimie, avec ses racines profondes dans la psyché, nécessite une approche thérapeutique adaptée. Bien que la psychanalyse traditionnelle puisse ne pas convenir à tous, l’histoire de Winnicott et Margaret I Little montre qu’avec adaptation et compréhension, elle peut offrir une guérison profonde. Il est crucial de reconnaître la valeur de telles approches individualisées dans le traitement des troubles alimentaires.

Laisser un commentaire