Alain Delon, l’un des acteurs les plus emblématiques du cinéma français, est souvent perçu comme un homme hautain, distant, voire narcissique. Pourtant, derrière cette image de dureté se cache une personnalité borderline hypersensible, en proie à une profonde souffrance intérieure. Un homme à fleur de peau, marqué par des blessures d’enfance qu’il n’a jamais réellement surmontées, et dont la véritable nature n’était perceptible que par ceux qui le connaissaient intimement.
Le charme ambigu d’une personnalité « borderline »
Delon se servait de sa beauté hors du commun pour sa vie professionnelle. Mais en réalité il n’en jouait pas. C’est souvent le cas des personnalité borderline qui affichent une image plus que parfaite extérieurement mais qui se battent pour ne pas se perdre dans un vide existentiel insupportable. Il se sentait mal aimé, il se sentait agressé, il était débordé par sa vie affective, convaincu que son physique éclipsait ce qu’il était réellement. Cette méfiance envers les autres, ce sentiment de ne pas être aimé pour lui-même, reflète l’hypersensibilité qui le caractérisait. Hypersensibilité, qu’il tentait de dissimuler sous une armure de dureté. Mais son attitude parfois violente, ses opinions tranchées, étaient une forme de défense. Lors d’une interview avec Bernard Pivot, lorsqu’on lui demanda ce qu’il espérait entendre de Dieu après sa mort, il répondit : « Je vais t’amener à ton père et ta mère qui maintenant sont réunis. » Cette réponse révèle une blessure profonde, celle d’un enfant qui n’a jamais accepté la séparation de ses parents, et qui en a porté le poids toute sa vie.
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L’enfant blessé que beaucoup pensaient mégalomane
Delon, que beaucoup percevaient comme mégalomane, n’était en réalité qu’un enfant blessé, en quête d’amour, très respectueux avec ses collègues et ses amis, très professionnel dans son métier selon ses collègues, vis-à-vis desquels il ne se la jouait jamais « star ». Tentant désespérément de cacher ses blessures derrière un masque de force, ses proches le disaient très généreux, très fidèle en amitié et en amour. Sa relation compliquée avec la société et les médias, son discours parfois choquant, n’étaient que des manifestations de cette souffrance intérieure. Il ne craignait pas de s’exprimer librement, même au risque de choquer, car au fond de lui, il était persuadé de ne pas être aimé pour lui-même. Cette attitude, typique des personnalités borderline, le rendait à la fois fascinant et incompris. Ses amis proches, ceux qui ont eu accès à sa véritable nature, décrivent un homme extraordinairement généreux, tendre, mais aussi profondément sombre. Jean-Claude Brialy, un de ses amis de longue date, le décrivait ainsi : « Alain est un homme au grand cœur, mais ce cœur est enfermé dans une forteresse que peu de gens peuvent atteindre. » Cette générosité, cette tendresse cachée, n’étaient visibles que dans l’intimité, loin des projecteurs.
La passion de son métier lui permettait d’échapper à l’ennui
Il l’a dit dans une interview avec Bernard Pivot : il redoutait l’ennui. Sa vie a été marquée par une quête incessante de paix intérieure. Souvent infructueuse, cette quête a été le moteur de beaucoup de ses actions. Lorsqu’il défendait des opinions controversées, comme son soutien à la peine de mort pour les criminels les plus odieux, il le faisait avec une intensité qui trahissait sa personnalité sans nuance. « Ces monstres ne méritent pas de vivre », déclarait-il, conscient du choc que ses paroles pourraient provoquer. Choquer n’était pas un problème ; il était persuadé de n’avoir rien à perdre, convaincu que l’amour des autres lui échappait de toute façon.
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Du complexe de l’imposteur à une personnalité enfin assumée
Vers la fin de sa vie, Delon semble avoir trouvé une forme de sérénité. Ceux qui l’ont connu dans ses dernières années parlent d’un homme plus détendu, plus souriant. Il avait, en quelque sorte, fait la paix avec lui-même. Comme le disait son producteur, Jean-Louis Livi : « Alain est enfin en accord avec le petit garçon qu’il a toujours été. »
Une personnalité fabuleuse, complexe et incomprise
La personnalité d’Alain Delon est celle d’un homme complexe, marqué par une hypersensibilité qui l’a poussé à se protéger derrière une armure épaisse. Son image publique, celle d’un homme froid et distant, était en réalité le masque d’un être profondément vulnérable. Delon n’a peut-être jamais fait de psychothérapie, mais il a rencontré des personnes qui ont su adoucir ses angles, lui permettant d’accepter peu à peu sa véritable nature et de s’investir passionnément dans sa carrière pour ne pas ressentir de souffrance affective.
En fin de compte, Alain Delon restera dans les mémoires comme un acteur brillant, mais aussi comme un homme fragile, un enfant blessé qui n’a jamais cessé de chercher l’amour et la reconnaissance, et qui, à l’âge mûr, portait encore la blessure de ne pas avoir eu des parents unis.
Comment le définir autrement qu’un enfant dans un corps d’adulte socialement affirmé et secrètement en quête d’amour ?