Addiction alimentaire: interview de Catherine Hervais par Bernard Pivot

Bernard Pivot n’avais jamais entendu parler de l’addiction alimentaire de nature psychologique. Cette interview a eu lieu lors de la parution de la première édition de: « Les toxicos de la bouffe » il y a 35 ans, (aujourd’hui en livre de poche). Elle avait à cœur avec ce livre d’expliquer que la boulimie et l’hyperphagie boulimique sont, psychologiquement, une addiction aussi sévère que celle aux drogues dures liée à un problème d’identité, une peur de la vie, le sentiment de ne pas exister vraiment.

L’approche psychologique de l’addiction

L’approche psychologique de l’addiction plonge ses racines dans les profondeurs de la psyché individuelle, traçant souvent les origines du comportement addictif aux premières expériences de vie. Cette perspective considère l’addiction, qu’elle soit à la nourriture, aux substances ou à tout autre comportement, comme un symptôme de problèmes psychologiques plus profonds. Ces problèmes peuvent inclure un sentiment d’insécurité, un manque d’identité, ou des expériences traumatisantes dans l’enfance qui n’ont pas été résolues ou traitées adéquatement.

Les thérapeutes qui adoptent cette approche travaillent à créer une relation thérapeutique basée sur la confiance et l’égalité, permettant ainsi au patient d’explorer en sécurité les aspects cachés de sa psyché et de comprendre comment ces facteurs contribuent à son comportement addictif. L’objectif est de traiter les causes sous-jacentes de l’addiction en aidant l’individu à développer une meilleure compréhension de soi, renforçant ainsi son identité et sa capacité à gérer les défis de la vie sans recourir à l’addiction.

L’approche comportementale de l’addiction

Contrairement à l’approche psychologique, l’approche comportementale se concentre sur les comportements observables et sur la manière dont l’environnement influence ces comportements. Dans le contexte de l’addiction alimentaire, cette approche cherche à modifier les habitudes alimentaires destructrices par l’apprentissage de nouvelles réponses plus saines. Les interventions comportementales peuvent inclure des techniques de gestion du stress, des stratégies pour éviter les déclencheurs de l’addiction, et l’instauration de routines alimentaires structurées.

L’approche comportementale est souvent jugée plus directe, car elle vise des changements observables et mesurables dans le comportement du patient. Bien que cette méthode puisse être extrêmement efficace pour certains, elle ne traite pas nécessairement les problèmes psychologiques profonds qui peuvent être à l’origine de l’addiction. Ainsi, une combinaison des deux approches est souvent la plus bénéfique, traitant à la fois les symptômes comportementaux de l’addiction et ses racines psychologiques.

Comprendre la boulimie comme un problème d’identité

Où en est-on aujourd’hui quant à la compréhension et au traitement des personnes qui ont une addiction alimentaire ? Presque au même point. La prise en charge est encore quasi exclusivement médicale et le but recherché vise à adopter un comportement alimentaire équilibré en espérant que de bonnes habitudes feront disparaitre l’addiction.

Si la médecine est très précieuse en complément pour soigner les conséquences physiques et mentales de la boulimie, l’addiction quant à elle devrait être traitée des psychologues spécialisés non pas aux problématiques de la nutrition mais à la problématique de ceux qui ont un problème d’identité. Le problème est tellement archaïque que le psy ne doit pas chercher dans le passé ce qui a pu se passer, En apprenant la relation à l’autre on apprend la relation à soi à condition que le psychologue (l’autre) s’investisse dans une relation d’égal à égal.

Tous les troubles du comportement alimentaires (TCA) ne sont pas nécessairement une addiction sévère.

Bien que les approches comportementales et psychologiques offrent des perspectives et des méthodes différentes pour traiter les TCA, une stratégie intégrée qui combine les forces de chaque approche est souvent la plus efficace. Mais tous les TCA ne sont pas nécessairement des addictions sévères relevant d’un problème d’identité. Reconnaître l’importance de traiter les causes profondes de l’addiction est crucial pour fournir un soutien complet et durable aux individus qui ont besoin d’apprendre la relation intime à l’autre pour devenir eux-mêmes.

 

¹ Interview de Catherine Hervais du 23 mars 1991 illustrant notre article de novembre 2013 intitulé « Boulimie.fr, pour quoi faire? »
² Présentation par l’auteure de son livre « Les toxicos de la bouffe« 

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