TDAH HPI et TCA boulimique : comprendre l’intellect refuge

Le TDAH (trouble de l’attention), le HPI (haut potentiel intellectuel et les TCA boulimiques (troubles du comportement alimentaire, un terrain commun ?

Le TDAH, avec ou sans hyperactivité, désigne aujourd’hui un fonctionnement marqué par une difficulté à maintenir l’attention, une impulsivité, une agitation interne ou motrice. Quant au HPI, le haut potentiel intellectuel, il désigne une vivacité cognitive au-dessus de la moyenne, souvent associée à une pensée en arborescence, à une hypersensibilité ou à un décalage avec l’environnement.

Ces deux termes, devenus courants en psychologie comme en psychiatrie, sont récents. Ce ne sont pas des vérités gravées dans le marbre mais des tentatives de description de comportements particuliers observés dans la population. Le TDAH et le HPI sont des façons de dire, en langage médical, que certaines personnes pensent vite, différemment, et ont du mal à se conformer à ce qu’on attend d’elles.

Mais que se passe-t-il quand à ces caractéristiques cognitives s’ajoute une souffrance plus secrète, celle des troubles du comportement alimentaire ? Et en particulier celle d’une boulimie installée, régulière, où la personne ne parvient pas à s’arrêter de manger, parfois jusqu’à vomir, parfois jusqu’à s’endormir dans un brouillard ? C’est là que les choses se complexifient. Et que l’intellect peut devenir un abri… presque une fuite.

La boulimie : un calmant émotionnel qui libère l’intellect

Les personnes atteintes de TCA boulimiques, surtout dans leurs formes régulières et sévères, vivent avec un rituel quotidien qui prend une place énorme : anticiper la crise, la vivre, puis la compenser ou s’en remettre. C’est une activité à part entière, souvent cachée, honteuse, mais tout aussi chronophage et envahissante que n’importe quelle addiction.

Mais paradoxalement, cette obsession pour la nourriture permet aussi une forme de calme. Une fois que la crise est passée, un espace mental se libère. Les émotions, comme absorbées par le rituel alimentaire, laissent place à une étrange vacuité intérieure. Et c’est dans cette vacuité que l’intellect peut se déployer.

De nombreuses personnes concernées par la boulimie racontent qu’elles sont très performantes sur le plan intellectuel. Elles lisent, conceptualisent, comprennent vite. Le cerveau fonctionne en roue libre, presque détaché du cœur. Ce n’est pas tant qu’elles sont HPI « de naissance » — même si certaines le sont —, c’est surtout qu’elles sont HPI d’adaptation : elles ont investi toutes leurs ressources dans la tête parce que le corps et le cœur sont devenus trop dangereux. Trop réactifs. Trop imprévisibles.

TDAH, HPI et boulimie : une dynamique commune de débordement

Il existe des points communs troublants entre les diagnostics de TDAH, de HPI et les formes sévères de TCA boulimique. Dans les trois cas, on observe :

une intensité de pensée difficile à canaliser ;

une saturation sensorielle rapide ;

un rapport au corps conflictuel : trop lent, trop vite, trop flou ;

une émotion envahissante ou au contraire zappée par la crise

La personne qui vit un TCA boulimique peut ainsi être perçue comme HPI par ses capacités de compréhension, et comme TDAH par son agitation intérieure ou son apparente dispersion. Mais ce qu’on oublie souvent, c’est que ces fonctionnements ne sont pas toujours des diagnostics séparés. Ils peuvent être des adaptations d’un même fond traumatique.

Lorsqu’un enfant a grandi dans un environnement peu sécurisé sur le plan affectif, il peut développer très tôt un besoin de contrôle. Le contrôle du corps, de la nourriture, de l’apparence. Et aussi un retrait dans l’intellect. Penser devient plus sûr que ressentir.

Un chaos émotionnel vite tempéré par la crise alimentaire

La fonction psychologique de la crise de boulimie est souvent mal comprise. Ce n’est pas une simple affaire de gourmandise ou de perte de contrôle. C’est un mécanisme d’absorption de l’émotion, un geste qui tente de calmer un orage intérieur.

Quand la personne mange, elle ne pense plus. Quand elle vomit, elle vide. Et quand elle s’endort ensuite, elle oublie. Cette séquence, aussi douloureuse qu’elle soit, évite l’effondrement psychique. C’est un système de survie, pas un caprice.

Et une fois que l’orage est passé, le mental reprend le dessus. C’est souvent à ce moment-là que la personne se plonge dans un livre, dans des raisonnements complexes, dans un univers intellectuel où elle excelle. Elle s’y sent forte, compétente, valorisée.

Une addiction sans drogue qui épargne l’intellect

Les personnes atteintes de TCA boulimiques, surtout dans leur forme sévère, vivent avec une obsession qui prend une place énorme : anticiper la crise, la vivre, puis la compenser ou s’en remettre. C’est une activité à part entière, souvent cachée, honteuse, mais tout aussi chronophage et envahissante que n’importe quelle addiction.

Mais paradoxalement, cette obsession pour la nourriture permet aussi une forme de calme. Une fois que la crise est passée, un espace mental se libère. Les émotions, comme absorbées par le rituel alimentaire, laissent place à une vacuité intérieure. Et c’est dans cette vacuité que l’intellect compense le vide laissé par les émotions refoulées par l’addiction.

De nombreuses personnes concernées par la boulimie racontent qu’elles sont très performantes sur le plan intellectuel. Elles lisent, conceptualisent, comprennent vite. Le cerveau fonctionne en roue libre, presque détaché du cœur. Ce n’est pas tant qu’elles sont HPI « de naissance » — même si certaines le sont —, c’est surtout qu’elles sont HPI d’adaptation : elles ont investi toutes leurs ressources dans la tête parce que le corps et le cœur sont devenus trop dangereux. Trop réactifs. Trop imprévisibles.

Conclusion : le faux calme du mental surinvesti

Dans bien des cas, ce qu’on appelle HPI n’est qu’un intellect utilisé comme rempart contre la douleur émotionnelle. Et ce qu’on nomme TDAH peut aussi être un système d’alerte interne hyperactif, toujours en train de guetter un danger, un rejet, une émotion qui déborde.

Chez les personnes boulimiques, ces dynamiques sont exacerbées. Et les termes psychiatriques peuvent parfois éloigner de l’essentiel : la quête d’un endroit où l’on pourrait enfin vivre ce que l’on ressent sans être débordé. Un espace intérieur où l’on pourrait ne plus avoir besoin de fuir, ni dans la nourriture, ni dans la pensée.

La guérison ne passe donc pas par une simple régulation des symptômes. Elle passe par une réconciliation avec le ressenti, même si ce ressenti est douloureux. Il faut pouvoir dire « j’ai mal » sans avoir besoin de manger, ou penser, pour ne pas le sentir.

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