Ce texte explore les troubles du comportement alimentaire à travers l’expérience du « vide abyssal ». Il propose une relation à soi plus douce et un entourage soutenant, afin d’apaiser la boucle vide-tension-crise-culpabilité pour prendre contact avec soi enfin réellement et durablement.
Parler des troubles du comportement alimentaire, c’est souvent parler d’un effort immense pour tenir debout à l’intérieur de soi quand tout semble se dissoudre. On pourrait croire, de loin, que manger trop, pas assez, ou tout contrôler est une histoire de volonté capricieuse, mais ce serait confondre la surface et la profondeur. Dans les TCA, il y a cette douleur muette qui pousse à serrer les dents, à multiplier les promesses et les résolutions, à recommencer malgré tout parce que l’on sent bien que ce que l’on cherche n’est pas de la performance mais un apaisement. Derrière les crises, les périodes de restriction, les allers-retours entre maîtrise et perte de maîtrise, il n’y a pas une défaillance morale ; il y a une tentative sincère de mettre un peu d’ordre dans une intensité intérieure difficile à apprivoiser. Beaucoup de personnes parlent d’un « vide abyssal », une impression qu’il manque quelque chose au centre, comme un trou dans l’étoffe des repères. Le matin, le monde paraît normal, et puis une vague invisible emporte l’élan. Des gestes se substituent aux mots. Manger, se priver, compenser, tout se met à signifier autre chose que l’alimentation elle-même. Pendant quelques instants, cela baisse le volume du tumulte, et c’est suffisant pour recommencer.
Cet éclair de soulagement explique en partie la force d’attraction des TCA. Ils offrent un moyen de baisser la pression. Mais la facture arrive vite, et elle est lourde : la honte s’installe, l’isolement prend de la place, le corps fatigue, et la culpabilité ne fait qu’ajouter de l’huile sur le feu. On aimerait se convaincre qu’il suffirait d’en savoir plus, de comprendre d’où vient ce vide, de lui donner une cause et un visage. Parfois, cela aide, mais pas toujours, et pas d’emblée. La compréhension a besoin d’un terrain calmé pour devenir utile. C’est pour cela que l’on peut commencer autrement : non pas par un grand plan, mais par quelques jours de pratique modeste, juste assez pour réchauffer le corps et apaiser la tête. Trois jours, soixante-douze heures, c’est peu et c’est beaucoup à la fois. C’est assez court pour que l’on ose essayer, assez long pour que quelque chose se décale. On ne guérit pas en trois jours, mais on peut amorcer une autre manière d’habiter la relation à soi, et ce déplacement, s’il tient, peut devenir un socle.
Avant d’aller plus loin, il faut dire ce que l’on appelle TCA, sans jargon inutile. Le mot recouvre des réalités multiples : la boulimie avec ou sans vomissements, l’hyperphagie boulimique, l’anorexie sous des formes différentes, des compulsions plus discrètes qui grignotent la journée, des alternances de contrôle et de débordement. Autant d’expressions d’un même mouvement : la nourriture, ou son absence, devient un message qui ne passe pas par le langage verbal. Ce message parle de trop plein ou de trop vide, d’anxiété sourde, d’un lien à soi qui a perdu ses points d’ancrage. À certains moments, avaler vite comble une brèche ; à d’autres, ne pas manger semble rendre au monde une netteté, comme si le bord des choses redevenait visible. Le problème n’est pas le désir d’apaisement ; c’est la manière dont cet apaisement se paie ensuite, et la manière dont il ferme l’espace au lieu de l’ouvrir.
Dire que les TCA ne sont pas une faiblesse morale n’est pas une formule de consolation. C’est une précision nécessaire. Le corps et la psyché font ce qu’ils peuvent avec les outils disponibles. Ils choisissent la voie qui marche à court terme. On peut le regretter, mais on peut aussi reconnaître, dans ce choix malheureux, une intelligence de survie. Ce regard change beaucoup de choses. Il n’excuse pas tout, il n’absout pas la souffrance infligée au corps, mais il évite une punition de plus, un jugement de trop. Il permet d’imaginer une troisième voie entre la capitulation et l’acharnement : se réguler autrement, par petites touches, et répéter. Cela paraît trop simple, mais c’est précisément cette simplicité qui donne une chance de durer.
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Le « vide abyssal » mérite qu’on s’y arrête, non pour l’ausculter à la loupe, mais pour le nommer sans le grossir. Ce n’est pas un trou noir métaphysique. C’est une expérience très concrète : des repères qui glissent, un sentiment d’étrangeté à soi, comme si l’on regardait sa vie depuis un pas de côté. Parfois le vide se manifeste comme une anesthésie ; tout devient plat, sans saveur, comme si le monde avait perdu son relief. D’autres fois, c’est l’inverse : tout résonne trop fort, une remarque, une image, un souvenir, et les émotions jaillissent sans passer par le filtre du délai. Dans ces moments-là, le mental veut comprendre. Il veut remonter à la cause, ouvrir toutes les boîtes, faire la carte de ce qui nous a faits. Il arrive que ce travail soit libérateur ; mais à l’instant où la tempête souffle, remuer l’énigme l’entretient. Il faut un peu d’abri pour penser juste. Nommer l’expérience suffit parfois : « en ce moment, je ressens un vide ». Le dire à voix basse, comme pour soi, installe un point fixe, minuscule mais réel. Ce point fixe n’explique rien et il ouvre tout : il redonne à la personne sa capacité d’observer. Or, dès que l’on observe, on retrouve un minimum de liberté pour agir.
Ce déplacement de la question « pourquoi ? » vers la question « comment ? » fait une différence. « Pourquoi ai-je ça ? » n’a pas de réponse simple, et quand le système est en surchauffe, la recherche de causes ressemble à une fuite vers le haut. « Comment puis-je baisser la pression aujourd’hui ? » ouvre des gestes accessibles : non pas des prouesses, mais des actes infimes, du côté du corps et de la relation à soi. On ne se force pas à aller bien, on ne se sermonne pas, on ne négocie pas avec le vide ; on fait un pas, puis un autre. On a le droit de n’y rien comprendre et d’agir quand même. On a le droit de laisser les grandes explications pour plus tard. Ce droit-là, étrangement, apaise déjà.
Dans beaucoup d’histoires de TCA, une boucle se répète : le vide, puis la tension, puis la crise, puis la culpabilité, et le vide revient, plus serré. Le corps se crispe, la respiration devient courte, les pensées se rigidifient, tout se met à accélérer, et la décharge semble la seule sortie. L’instant de la crise apporte un vrai soulagement, si bref soit-il ; cela compte, et il faut l’entendre. Ensuite vient le retour de flamme, cet écrasement qui fait dire qu’on n’y arrivera jamais. Il est utile de repérer cette mécanique non pour s’y résigner, mais pour identifier l’endroit où intervenir. Il y a un sas, souvent très court, entre la montée de la tension et la bascule. Ce sas ne se présente pas toujours avec le même visage ; parfois il ressemble à un haussement d’épaules, parfois à une irritabilité soudaine, parfois à un brouillard dans la tête. Quoi qu’il en soit, s’y faufiler change la suite. Il ne s’agit pas d’être héroïque ; il s’agit d’ajouter une seconde d’intervalle.
C’est là que l’idée de soixante-douze heures prend sens. Pendant trois jours, on suspend l’auto-jugement. Non pas parce que l’on se croit tout permis, mais parce que l’on a compris qu’il ne sert à rien d’ajouter une punition à la difficulté. On remplace la phrase qui accuse par « Aujourd’hui, je fais au mieux. » On l’écrit, on la colle, on la murmure le matin et le soir. On la reprend quand l’esprit s’emballe, quand la honte montre les dents, quand l’impatience fait trembler les mains. Cette simple phrase ne transforme pas le monde, mais elle change la température interne : la pression baisse d’un cran, puis d’un autre. Ce temps protégé surprend l’entourage ; il peut agacer, inquiéter, susciter une plaisanterie mal placée. On peut le dire sans polémique : « je fais un petit test de soixante-douze heures, on en reparle après. » On ne cherche pas à convaincre, on demande juste un peu d’espace. Et l’on garde en tête la phrase-clef : « Ne vous laissez pas rompre votre mouvement : ce n’est que trois jours. »
Pendant ces trois jours, on adopte une autre boussole : « Comme je n’y comprends rien, je pratique. » Il ne s’agit pas de mépriser l’intelligence, ni de renoncer à comprendre sa propre histoire. Il s’agit de remettre l’analyse à plus tard, justement pour pouvoir y revenir depuis un sol moins mouvant. Pratiquer, ici, veut dire poser des actes petits et concrets, puis regarder ce que cela change. Le corps, dans sa sagesse ancienne, rappelle qu’un rythme simple l’apaise : boire tiède quand tout s’emballe, laisser l’expiration durer un peu plus que l’inspiration, ouvrir la fenêtre au réveil et regarder la lumière, même grise, poser la main contre le sternum et tenir quelques secondes le regard sur un point, marcher dix minutes sans objectif de performance, laisser une matinée démarrer sans écran pour que les sens se synchronisent. On n’empile pas des exploits ; on répète des gestes pauvres, et c’est cette pauvreté même qui les rend tenables.
Il est tentant de transformer ces gestes en injonctions. Ce serait retomber dans la rigidité. Il vaut mieux les considérer comme des invitations répétées, qu’on ajuste selon sa journée et son corps. S’il est trop tard pour marcher, on lit simplement à voix haute un paragraphe doux, juste pour changer la couleur de la pensée. Si l’on n’a pas faim mais que l’on sait qu’il faut rester en lien avec son corps, on glisse un aliment facile, non pour obéir à une règle parfaite, mais pour rester dans la continuité. Après un moment difficile, on se rince, on se couvre, on s’assoit, et l’on revient à la phrase du jour. Rien de spectaculaire. Beaucoup de fidélité à de petites choses.
Cette fidélité se heurte souvent aux autres. Il faut le dire franchement : ce qui met en danger, ce n’est pas seulement l’intensité intérieure, c’est aussi le monde autour, ses rythmes, ses commentaires, ses attentes. Quand vous essayez pendant trois jours de changer la texture de vos gestes, certains se moquent, d’autres minimisent, d’autres s’énervent. Cela ne signifie pas qu’ils soient malveillants. Ils ne savent pas, ou ils ont peur, ou ils se sentent visés. La meilleure manière de protéger votre essai n’est pas d’ouvrir un débat, mais de poser une frontière douce : « je fais doucement, j’ai besoin de ce temps-là, on parlera après. » Vous ne demandez pas la permission d’exister ; vous décrivez votre itinéraire d’aujourd’hui. Il y a là une manière de prendre soin de la relation à soi sans rompre la relation aux autres. C’est tout l’art : préserver la flamme dans le vent, sans se retirer du monde.
Avec le temps, l’on s’aperçoit qu’il n’existe pas un seul soi, monolithique et clair, mais toute une petite foule intérieure. Il y a la part qui tient l’agenda, celle qui veut plaire, celle qui voudrait tout arrêter, celle qui fait des blagues, celle qui s’applique, celle qui se cache. Les TCA prennent souvent appui sur le faux-self, ce personnage social qui sait quoi dire, quoi faire, qui rassure les autres, qui parle calmement et sourit. Le soir, ce personnage se fatigue. Il a besoin d’un relais. Or le vrai soi, celui qui ne performe pas, se présente sans décor, sans titre, parfois sans voix. L’alimentation occupe alors la scène. C’est une prothèse relationnelle : elle console, elle tient lieu de compagnie, elle remplace la parole, elle fournit une texture aux heures où l’on se sent trop vide ou trop plein. S’en rendre compte ne condamne pas à l’amertume. Au contraire, cela ouvre une piste : si l’on peut fabriquer autrement de la présence, si l’on peut réchauffer la relation à soi par des gestes simples, alors la prothèse devient moins indispensable.
Ce travail touche à l’intimité la plus ordinaire : la voix avec laquelle on se parle, la façon dont on tolère l’imperfection, l’art de dire non sans faire une scène, la capacité à élaguer, pour un temps, ce qui grignote l’énergie. Devenir fréquentable pour soi n’a rien d’ésotérique. C’est choisir un ton intérieur qui n’humilie pas. C’est accepter l’échelle des petits pas, ce réalisme têtu qui préfère un millimètre de mieux à un grand dessein qui s’effondre. C’est poser des limites qui protègent, ne serait-ce qu’une soirée sans obligation supplémentaire, une heure où l’on coupe le fil des demandes pour faire quelque chose de chaud et d’inutile. Dans cette modération, quelque chose se rerègle. On s’aperçoit qu’il reste des choses agréables et calmes, même quand la vie ne ressemble pas à ce que l’on imaginait.
Rien de tout cela n’interdit de demander de l’aide. L’isolement nourrit les TCA, et les TCA nourrissent l’isolement ; ce tête-à-tête est un piège. Parfois, il suffit d’une personne de confiance pour changer la donne, quelqu’un qui comprend votre pacte de soixante-douze heures, qui ne commente pas à l’excès, qui propose une marche plutôt qu’un discours. Parfois, il faut un cadre plus net. Le médecin traitant reste un point d’appui précieux, pas seulement pour surveiller la santé du corps, mais parce qu’il inscrit le travail dans une réalité partagée. La psychothérapie a sa place, individuelle ou de groupe. Beaucoup découvrent, dans l’espace d’un groupe, la possibilité de tester sans jouer un rôle, de respirer au milieu d’autres humains qui essaient eux aussi. On n’y vient pas pour se confesser, on y vient pour pratiquer à plusieurs. Cette présence, même silencieuse, a un effet de stabilisation. Elle remet du réel là où l’imaginaire prenait toute la place.
Il faut cependant garder un principe de sécurité devant soi comme une balise. Rien de ce qui est dit ici ne remplace les soins quand ils deviennent nécessaires : si le corps montre des signes inquiétants, si l’on se sent glisser vers une zone de danger, si des pensées de mort envahissent la tête et ne lâchent pas, la priorité absolue redevient médicale. On peut s’arrêter, appeler, se faire accompagner, se présenter à l’hôpital. Il n’y a pas d’échec à demander de l’aide, il y a un respect de la vie, ce qui est la condition de toute suite possible. La douceur, dans ces moments-là, consiste à se donner les moyens de continuer.
Revenons à ce qui se joue au fil des jours, là où le changement est moins spectaculaire et plus fidèle. Un rythme n’est pas un carcan ; c’est une musique de fond qui empêche le chaos de tout envahir. Le corps aime savoir à peu près à quelle heure il s’endors, il aime retrouver une lumière le matin, il aime que l’on lui parle sans colère, même quand il n’obéit pas. Il existe une sorte d’écologie des micro-gestes qui, rassemblés, reconstituent un climat. Chacun peut inventer ses appels d’air : boire tiède à certains moments, marcher sans chercher la performance, lire un peu à voix haute pour changer la teinte des pensées, ralentir à table pour sentir la présence des aliments plutôt que l’idée de bien ou de mal, laisser les écrans hors du lit pour que la nuit dure son temps. Ce sont des détails, mais la vie se tisse de détails. Les TCA aiment les grands discours parce qu’ils se nourrissent d’absolus ; ils se fatiguent plus vite dans les routines modestes.
À force d’essais, on apprend à reconnaître des signes avant-coureurs : la mâchoire qui se serre, les épaules qui montent presque à l’insu de la personne, la pensée qui devient binaire, le besoin soudain de s’isoler alors même que la solitude va faire mal. Ces signes ne sont pas des ennemis. Ils sont des messagers. Les entendre à temps permet d’ouvrir l’intervalle très court grâce auquel la trajectoire peut encore tourner. On peut s’adosser, poser les pieds, respirer plus longuement à l’expiration, poser une main au centre de la poitrine, nommer doucement ce que l’on ressent, non pour s’observer comme un objet, mais pour réintroduire de la présence. Les jours où l’on y parvient, ce n’est pas glorieux, ce n’est pas instagrammable, mais c’est exactement ce qui construit la suite.
La suite, d’ailleurs, n’a pas besoin d’un programme grandiose. Elle a besoin de répétition. Les soixante-douze heures ne sont pas un défi à réussir puis à oublier, ce sont des briques que l’on peut remettre, semaine après semaine, jusqu’à ce que la maison tienne sans effort. Il y aura des jours de rechute. Ils ne racontent pas une condamnation ; ils racontent une fatigue, un hasard, une nouvelle qui a secoué la table intérieure. Dans ces moments-là, l’échelle d’observation se réduit. On peut prononcer à nouveau « Aujourd’hui, je fais au mieux », et cela suffit pour choisir la prochaine petite chose qui aidera. L’orgueil voudrait un grand rattrapage, un geste qui annule la veille ; la sagesse préfère le prochain millimètre.
Il arrive que la compréhension fasse alors son retour, au calme. On voit mieux comment l’histoire a formé certaines habitudes de relation à soi et au monde. On comprend à quel point l’hypersensibilité n’est pas un défaut, mais un mode de perception qui demande plus d’appuis, plus de ménagements, plus de clarté. On mesure ce que l’on doit au faux-self, cette structure qui nous a protégés et qui peut, désormais, se reposer un peu. On découvre, surtout, que la vie valide les essais modérés : dormir un peu mieux change la façon dont on parle, boire tiède à tel moment évite une bascule, dire non poliment économise l’énergie qui manquait. À force de petits choix, on reconstruit une confiance en soi qui n’est pas une posture, mais une expérience accumulée.
Tout cela pourrait sembler trop simple, mais c’est précisément le pari : la simplicité est ce qui tient alors que les grandes résolutions s’effritent. Une phrase, deux gestes, un cadre temporel court, et la permission de recommencer. La permission, aussi, d’expliquer aux autres, quand c’est utile, que vous êtes en train d’essayer quelque chose et que leur soutien consiste surtout à ne pas vous détourner de votre mouvement. Ce n’est pas demander de l’indulgence, c’est demander un peu de silence autour de l’expérience. Le résultat se voit, non dans l’exploit, mais dans ces journées où l’on se sent un peu plus vivant et un peu moins assiégé. Le vide ne disparaît pas toujours ; il perd de sa menace. Il devient un espace à habiter plutôt qu’un gouffre à éviter.
On pourrait finir par une proclamation, mais ce n’est pas le ton. Mieux vaut une poignée de phrases qui accompagnent, comme des pierres discrètes posées sur le bord du chemin. « Aujourd’hui, je fais au mieux », c’est l’une de ces pierres. « Comme je n’y comprends rien, je pratique », en est une autre. Entre les deux, il y a cet avertissement bienveillant : ne vous laissez pas rompre votre mouvement ; ce n’est que trois jours. Trois jours pour vérifier que la douceur n’est pas une faiblesse, que la répétition n’est pas une punition, que la présence au corps n’est pas une concession, mais une manière de revenir chez soi. Le reste viendra, à son heure, parce que l’on aura préparé le terrain.
Et s’il fallait une dernière image, ce serait celle d’une flamme simple sous un vent capricieux. On peut la protéger avec les mains, on peut lui trouver un coin moins exposé, on peut la nourrir d’un peu de combustible, sans grand geste ni grande théorie. La flamme, c’est votre relation à vous-même quand tout s’agite. Elle n’a pas besoin d’un brasier pour éclairer. Elle a besoin d’air juste et de constance. Trois jours suffisent à la voir reprendre. Ensuite, on recommence, et la lumière s’installe un peu plus longtemps.