Un réflexe de survie

Un réflexe de survie

P our ma part, à vingt ans, plus rien n’a compté que manger. Quand j’ai commencé à devenir boulimique, je ne me suis pas demandée pourquoi ni comment ça avait pu m’arriver.

P our ma part, à vingt ans, plus rien n’a compté que manger. Quand j’ai commencé à devenir boulimique, je ne me suis pas demandée pourquoi ni comment ça avait pu m’arriver. D’ailleurs ce que je vivais n’avait pas de nom. C’était un réflexe de survie pour continuer à vivre cette vie où tout prenait en même temps un sens et son contraire.

Être aimée et ne pas se sentir aimée, vouloir dire non et s’entendre dire oui à la place. Ne pas avoir envie, mais le faire quand même. Marcher et se sentir paralysée. Respirer et s’asphyxier en même temps. Apprendre et oublier dans le même instant. Je me sentais si mal, bonne à rien, si inutile face à ces contradictions perpétuelles, comme si j’étais en permanence à côté de la vie sans pouvoir jamais y prendre ma place. Que faire face à ce vide d’existence. Se remplir, vite et bien, je dirais, engloutir des monceaux de nourriture, tout ce qui me tombais sous la main, qui me donnait instantanément la sensation d’être simplement vivante ».

La boulimie n’est pas le fond du problème

{xtypo_quote_right}Certains voient la boulimie-anorexie comme un suicide déguisé. Pour Marie elle a été un réflexe de survie qui l’a empêchée de mourir.{/xtypo_quote_right}Marie, très émue, lit une la lettre qu’elle a écrite pour le documentaire  » Boulimie et Thérapie « . Avec une vingtaine d’autres participants, elle est venue dire qu’on s’en sort à condition de comprendre que la boulimie est un  » réflexe de survie  » et non le fond du problème. La boulimie fait peur. Certains la voient comme un suicide déguisé. Mais, comme toute addiction, elle a du sens et Marie explique que c’est la boulimie ce qui l’a empêchée de mourir. Certes, les crises de boulimie peuvent causer des perturbations organiques et métaboliques qui se révèlent parfois très dangereuses pour la santé et un suivi médical est donc recommandé pour pallier les carences ou les dysfonctionnements.

Plutôt donc que de chercher à contrôler ses comportements alimentaires, Marie entreprend une psychothérapie pour soigner son malaise intérieur qui la pousse à faire des boulimies. Si, à cette époque, la boulimie est une sorte de canne qui lui permet de tenir debout, elle veut apprendre à tenir debout autrement, avant de supprimer la canne.

Elle se lance dans une thérapie de groupe dont l’objectif est de travailler sur son identité et non sur ses comportements alimentaires. Il ne lui est pas demandé de renoncer à ses crises de boulimie.

Au départ, la thérapie de groupe lui fait peur

Au départ, le groupe lui fait peur. Ce n’est pas évident pour elle de prendre la parole devant une vingtaine d’autres personnes. Mais très vite dit-elle dans le film « Boulimie et Thérapie », elle sent » un vrai climat d’empathie, une vraie qualité d’écoute  » ainsi qu’une opportunité pour elle d’apprendre à prendre sa place.

Qui est-elle au fond ? De quoi a-t-elle besoin ? Que veut-elle vraiment ? Autant de questions basiques auxquelles elle vient chercher des réponses.

C’est dans le groupe, à chaud, qu’elle trouve elle-même ses propres réponses :  » Je crois que pour moi, ce qui a été le plus important et la première prise de conscience, ça a été l’occasion de pouvoir avoir des confrontations négatives avec les gens. J’ai eu l’occasion de pouvoir faire des jeux de rôle où je m’autorisai à dire « non » à ma mère. Pas tout de suite mais au bout d’un mois ou deux, j’ai senti que cet exercice m’avait permis de m’affirmer, de faire la paix avec mon passé « .

Difficile de rendre une expérience par des mots mais pour faire court, Marie pense que le groupe lui a enfin donné le sentiment d’exister qu’elle n’avait pas. A l’issue de ce travail ses boulimies ont disparu.

Le témoignage de Marie n’est qu’un parmi d’autres témoignages de  » Boulimie et Thérapie « . Ce film qui existe en DVD a été créée avec une vingtaines d’autres participants (eux aussi anciennement boulimiques) pour illustrer, de manière très claire, que l’on s’en sort, non pas en contrôlant son alimentation, mais en apprenant à exister. Une fois ce travail de fond accompli les boulimies disparaissent d’elles-mêmes.

Catherine Hervais

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