Boulimie : comment s’en sortir par soi-même

La boulimie est une lutte intérieure profonde, souvent incomprise par ceux qui ne l’ont jamais vécue. Elle est le reflet d’une angoisse, d’un manque d’estime de soi et d’une quête d’équilibre émotionnel. Pourtant, il est possible de trouver des moyens de surmonter cette condition et de mener une vie épanouissante.

Dans les lignes qui suivent, bouimie.fr propose des conseils précieux qui découlent des expériences de celles et ceux qui ont surmonté cette addiction. Ces conseils, bien que simples en apparence, peuvent être la clé pour retrouver confiance en soi et établir des relations saines avec soi-même et avec les autres.

 

« Un jour » confie Catherine Hervais,  » j’ai rencontré une jeune femme qui avait été boulimique et qui avait réussi d’elle-même à faire le chemin qu’elle aurait fait en thérapie.
Très amoureuse de son mari, elle avait accepté de se laisser guider par lui et avait fait, grâce à lui, des apprentissages relationnels qui lui ont permis d’amorcer un véritable changement de personnalité. Il ne l’avait pas guidé sur son comportement alimentaire, bien sûr (je crois me souvenir qu’il ignorait même qu’elle était boulimique), mais lorsqu’elle était décalée (trop soumise, trop plaignante, trop parano), il le lui faisait remarquer gentiment, et elle avait appris peu à peu la nuance, l’estime de soi et l’équilibre. »

Cette histoire est exceptionnelle parce que c’est rare qu’un proche sache coatcher une personne émotionnellement immature. En général, c’est un travail que l’on fait en thérapie. Mais si vous êtes boulimique, et que vous n’avez pas la possibilité de faire une thérapie, voici quelques pistes pour faire une grande partie du chemin vous-même et vous orienter vers une vie sans boulimies.

1. Cessez d’avoir honte de faire des boulimies.

Même boulimique, acceptez-vous avec vos crises. Je sais qu’elles sont très difficiles à vivre pour vous, mais cessez de culpabiliser.

Ce n’est pas votre faute si vous faites des boulimies, c’est une angoisse profonde qui vous les fait faire, et tant que vous n’aurez pas fait le nécessaire pour apaiser cette angoisse, les boulimies resteront un réflexe incontournable.

La boulimie est un refuge qui vous est nécessaire pour le moment. Même si vous avez de la volonté dans d’autres domaines, dans celui-là vous ne réussissez pas à tenir très longtemps. Votre obsession de la bouffe aura raison de vous.

Par contre, allez voir votre médecin pour faire des analyses régulièrement. Pour celles d’entre vous qui se font vomir, vous le savez, quand on vomit beaucoup on peut faire des accidents de santé. Le manque de potassium peut être dangereux. Une surveillance médicale est nécessaire régulièrement. Je me souviens d’ une jeune femme trop maigre, désespérée, apathique. Elle était tellement dénutrie qu’elle en perdait même ses cheveux.

Elle se faisait vomir du matin au soir. Elle vomissait tout ce qu’elle mangeait, ne gardant même pas son petit-déjeuner.

Avec l’accord du médecin qui connaît bien mon travail, je ne lui ai pas demandé d’arrêter de vomir (je sais par expérience que, lorsqu’on arrête de vomir, on peut devenir obèse en un rien de temps. Par contre, je me suis arrangée avec elle pour que, tout au long de sa psychothérapie, elle absorbe suffisamment de protéines et vitamines liquides le soir, après sa dernière boulimie, juste avant d’aller dormir. Elle prenait des yaourts et ça lui a été possible de remplacer les yaourts par les crèmes protéinées. Elle réussit ainsi à éviter l’hospitalisation.

Je l’ai croisée, tout récemment, dans ma rue. Deux ans avaient passés après la fin de sa thérapie. Elle était resplendissante. Légèrement étoffée, elle ne perdait plus ses cheveux, avait un petit ami depuis peu, mangeait normalement et la vie semblait lui semblait considérablement plus légère.

N’hésitez pas non plus à voir votre médecin quand vous êtes désespéré(e), au bout du rouleau. Il vous proposera peut-être un antidépresseur et-ou un anxiolytique. Prenez-les. N’ayez crainte de l’accoutumance, ce n’est pas parce que vous êtes boulimique que vous en serez dépendant(e). Ça vous aidera à passer un cap difficile.

Vous pourrez toujours voir avec lui pour les diminuer ensuite progressivement jusqu’à les supprimer tout à fait dès que le très mauvais passage sera traversé. Mais conformez-vous bien à la prescription (les anxiolytiques sans antidépresseurs peuvent déprimer).

Pour les vomisseuses, lorsque vous maigrissez beaucoup et que vous n’avez plus de force, un passage dans un service hospitalier, pour retrouver des forces peut être nécessaire. L’ambiance n’y est pas toujours idéale, mais dans ce cadre vous réussirez temporairement à faire une pause salutaire sans boulimies. Vous retrouverez des forces et un moral suffisants pour repartir ensuite sur un rythme différent.

Pour les vomisseuses, selons nos dernières informations ne surtout pas se brosser les temps tout de suite après avoir vomi, car le brossage immédiat des dents acidifiées par le suc gastrique détériore l’émail. Il vaut mieux se rincer la bouche à
l’eau claire ou avec une solution pour bain de bouche et attendre une dizaine de minutes avant le brossage ».

Nettoyez bien les toilettes. N’hésitez pas à mettre un produit « sent bon ». Vous avez le nez bouché et vous ne vous rendez pas compte des odeurs qui restent et qui incommodent et angoissent très probablement vos proches.

Enfin, et cela s’adresse aussi à toutes les autres, trouvez un système pour que ce que vous mangez soit remplacé aussitôt. Vous avez le droit d’être boulimique, par contre, votre famille doit pouvoir trouver, le soir en rentrant, tout ce dont elle a besoin pour le dîner.

2. Refusez d’avoir honte de vous-même.

Au fond de vous-mêmes vous vous sentez tellement vide que vous avez honte face aux autres avec qui vous partagez de l’affectif. Je sais que certaines personnes boulimiques sont très à l’aise dans le social tant qu’elles restent dans le superficiel. Mais dès qu’elles abordent les rapports qui mettent en jeu l’émotionnel, elles se sentent tout aussi vides que les autres).

Vous angoissez de ne pas être à la hauteur, d’être ridicule, de ne pas intéresser, de ne pas renvoyer l’image que vous pensez qu’on attend de vous. Dites-vous que vous êtes comme vous êtes, que ce n’est pas de votre faute et que vous avez le droit de vivre. Sachez simplement écouter sans rien chercher à prouver. Pour ce qui est du vide que vous ressentez, voici quelques conseils pour construire quelque chose à l’intérieur.

3. Avant toute chose, ne détruisez pas votre environnement.

Que vous viviez avec vos parents, que vous ayiez un petit ami, un mari et des enfants, ne polluez pas leur atmosphère, même si vous êtes très très mal. Vous n’êtes pas obligée de dire que vous allez bien, mais évitez de vous plaindre et de gâcher leur joie de vivre. Leur joie de vivre vous aidera à rebondir quand vous en aurez besoin.

Ne les tenez pas informés de toutes vos boulimies (ou chaque fois que vous allez vomir, si vous faites partie des personnes qui vomissent), même s’ils insistent pour savoir.

Vous les inquièteriez inutilement sans rien résoudre pour autant. Votre entourage finirait par être obsédé par votre problème et ne s’autoriserait pas à vivre avec la légèreté nécessaire à leur bien-être.

4. Méfiez vous des convictions

Vous jugez tout le temps et tout doit marcher selon vos convictions. L’autre est alors génial quand il réussit ce que vous ne parvenez pas à faire et il devient ininterressant pour un petit détail qui vous déçoit. Méfiez vous de vous-mêmes quand vous êtes agressif, complexé ou que l’autre subitement ne vous intéresse plus. Dans ces moments-là vous êtes en plein « délire » narcissique comme si les gens ne pouvaient exister qu’au travers de vos valeurs. Laissez les  être eux-mêmes sans les juger, acceptez que par moments ils ne soient pas « parfait », qu’ils vous déçoivent. Bref, méfiez vous de vos revirements extrêmes: dans ces moments-là vous n’êtes pas dans la réalité.

Vous n’êtes pas dans la vraie vie non plus quand vous vous mettez en quatre pour faire plaisir. Attention, l’autre ne vous en demande souvent pas autant. Très vite il vous trouvera « gavant(e) » sans compter que le reste du temps vous devenez terriblement exigeant(e), capable de fondre en larmes ou d’exploser lorsque l’autre ne fait pas ce que vous attendez de lui  —là ou toute autre personne fonctionnant sainement ferait juste une remarque. Si vous ne jugez pas l’autre si vous ne l’agressez pas quand il vous déplaît, votre vie sociale et amoureuse deviendra enfin paisible malgré vos moments de chaos intérieurs qui, contrairement à ce que vous pensez sur le moment, ne sont pas la faute de l’autre. Bref, quand vous êtes déçu ne dites rien. L’autre n’est pas seulement sur terre dans le but de vous plaire 🙂

On est ensemble pour le meilleur (pas pour se compliquer la vie). Si vous rentrez et que votre copain n’a pas fait la vaisselle ou s’il n’a pas couché les enfants, ne soyez pas acide. Il a le droit de faire (ou de ne pas faire) ce qu’il veut, quand il veut, même si ça ne vous convient pas tout à fait.

Par contre n’hésitez pas à dire votre déception, sinon elle vous rongerait au fond de vous-même pendant très longtemps. Mais dites-le sans agressivité. Dans certain cas, en parler calmement, sans haine, vous aidera à éviter une boulimie. Les personnes boulimiques ont tendance à ne pas vouloir reconnaître que l’autre est différent, avec des rythmes différents.

Si vous êtes encore ado et que vous vivez avec vos parents, ne boudez pas et ne répondez non pas avec agressivité.

La maison doit être un lieu de détente et pas de devoir. Pour l’instant, avec la boulimie, vous vivez un enfer, laissez les autres respirer. Qu’ils soient heureux. Et à un moment ou un autre leur joie de vivre vous aidera à remonter vers le haut.

Dans le même registre, toujours sur la base d’un système de vie où l’autre ne vous doit rien et où vous ne lui devez rien, ne faites pas de reproche. D’autant que, si vous en faites, l’autre vous en fera aussi et la vie sera infernale. Avec votre hypersensibilité, vous avez besoin d’un environnement calme, sans agressivité et sans reproche. Construisez-le.

5. Ne cherchez pas à avoir toujours raison

S’il n’est pas conseillé d’être agressif, il n’est pas bon de ne rien dire non plus. Même si ce que vous avez envie de dire ou de faire risque de ne pas plaire, dites-le, par devoir vis-à-vis de vous-même. Dites-le sur un ton gentil, mais dites-le. Vous n’êtes pas sur terre pour plaire à l’autre. Acceptez momentanément de déplaire. Vous n’en serez que plus séduisant(e) et mieux dans votre peau.

Inversement, n’acceptez pas l’agressivité de l’autre, même quand vous avez tort. Personne n’est parfait. Quand on est chez soi, on a le droit de se tromper. N’acceptez pas qu’on vous parle sur un ton qui ne vous plait pas. Un mot de travers et vous êtes à l’envers pour toute la journée. Quand c’est le cas, demandez fermement qu’on change de ton. (Bien entendu, vous ne pouvez l’exiger que si vous n’êtes, vous-même pas agressif).

Dans le même esprit, acceptez que les autres ne soient pas de votre avis. Faites-vous violence pour ne pas broncher.

Vous pouvez donner votre opinion, mais vous ne devez pas entrer dans le conflit. La liberté et la légèreté commencent par le droit d’expression. Même si vous estimez que l’autre dit des absurdités.

Dites ce que vous n’aimez pas ou ce que vous ne supportez pas sur un ton plutôt gentil. L’autre n’est pas à votre disposition et il a le droit de ne pas faire ce que vous attendez de lui, même si vous vous êtes donné du mal pour le satisfaire peu de temps auparavant. Si vous dites les choses gentiment, il essaiera probablement de ne pas vous contrarier la prochaine fois. Bien sûr, pas du jour au lendemain, s’il vous connaît agressive. Mais quand il aura réalisé que vous le respectez, il vous respectera aussi..

6. Ne soyez pas soumis(e).

Certaines personnes boulimiques ont si peu confiance en elles, elles sont tellement effacées qu’on ne les voit pas. Obligez-vous à vous situer dans la relation. Dites ce que vous aimez.

Dites ce que vous n’aimez pas. Sans inonder l’autre, bien sûr, mais positionnez-vous. Chaque fois que vous le ferez, cela renforcera l’estime de vous-même.

7. Ne faites que ce qui vous fait plaisir

Attentives à survivre, les personnes boulimiques en sont plus à chercher des soulagements que des plaisirs. D’ailleurs, le plus souvent, elles ne savent pas ce qui pourrait leur faire plaisir. En revanche elles y voient plus clair en ce qui concerne les déplaisirs. C’est un début pour trouver son chemin : éviter ce qui vous crée du déplaisir, à moins que ce ne soit absolument nécessaire. Par exemple, il est nécessaire d’aller en classe ou au travail, mais il n’est pas nécessaire de manger à table avec les autres ou d’aller passer tous les week-ends dans sa belle famille . On peut faire des choses qui ne font pas plaisir à l’autre. On ne les fait pas contre l’autre, on les fait pour soi. A l’autre d’être tolérant et à vous de le dire gentiment.

Ces quelques conseils peuvent, à priori, vous sembler bien dérisoires et sans rapport direct avec votre immense détresse personnelle. Pourquoi s’occuper de la relation avec les autres quand on n’a même pas de relation avec soi-même ?

Tout simplement parce que la boulimie vient d’une angoisse qui, comme je l’ai dit par ailleurs, vient d’un manque de confiance en soi et d’un manque d’estime de soi. Restaurer l’une et l’autre vous feront avancer sur le chemin qui vous mènera à une vie sans boulimie.

Pour en savoir d’avantage sur tous ces points relationnels vous pouvez vous faire aider en lisant les quelques ouvrages que je vous propose dans la bibliographie, notamment le très bon livre de Josyane de Saint Paul « Estime de soi, confiance en soi » (InterEditions)

Attention, il vous faut de la constance et de la patience. Si vous tenez trois semaines et que vous dérapez cinq minutes au bout de ces trois semaines, tout est à recommencer depuis le début

 

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