SITE D'INFORMATIONS POUR LA COMPRÉHENSION ET LE TRAITEMENT DE L'ADDICTION ALIMENTAIRE: BOULIMIE, ANOREXIE, HYPERHAGIE ETC.
boulimie.fr
compilation de tous les articles de boulimie.fr
A paraître

Ce site porte un regard essentiellement psychologique et psychanalytique sur l'origine de la boulimie

Selon les travaux de
la psychologue Catherine Hervais
https://hervais.com : contact

Boulimie hyperphagie : une addiction alimentaire sévère

Auteure de l'article : Catherine Hervais,
psychologue spécialisée dans l'addiction alimentaire

Chaine Youtube 

 

Souvent les personnes qui ont une boulimie hyperphagie sévère voient, en cours de psychothérapie, leur addiction diminuer en quantité, en fréquence et aussi en terme de nécessité immédiate absolue. Guérir la boulimie hyperphagie ça peut consister à devenir de moins en moins tyrannique en cours de thérapie. Peut-on encore appeler ce nouveau comportement alimentaire de la boulimie hyperphagie, même si c’est encore manger pour se calmer, même si on se fait vomir après, ou même si on surveille son poids au gramme près tous les jours ?

 

Boulimie hyperphagie une addiction alimentaire sévère

 

Boulimie hyperphagie 

Boulimie hyperphagie sévère

 

La boulimie hyperphagie fait partie des addictions sévères.

« Sévères » pour insister sur le fait qu’elles semblent « voler » littéralement toutes les pensées et même la vie de ceux qui en sont victimes.

À l’expérience, d’un point de vue psychologique, la réalité est inverse. Ce n’est pas parce que les gens ont une boulimie hyperphagie qu’ils ne parviennent pas à vivre. C’est parce que les gens ne parviennent pas à vivre tels qu’ils sont qu’ils ont une boulimie hyperphagie, addiction ayant pour fonction de permettre à la personne de rester en vie plutôt que mettre fin à ses jours pour échapper à la souffrance intérieure. Ce qui ait la sévérité de cette addiction c’est que sans elle la personne ne peut pas vivre. Commettre l’erreur de lutter contre la pulsion a pour résultat de lui donner plus de force. Le conflit en résulte entraîne une tension intérieure qui fait souffrir. Il est donc vain de chercher à contrer la pulsion par des sevrages elle reviendra toujours parce qu’elle a une fonction : la boulimie hyperphagie permet de rester en vie.

 

Boulimie hyperphagie 

Quoi Faire en cas de boulimie hyperphagie sévère ?

 

Pour agir sur l’addiction boulimie hyperphagie, il faut s’attacher à considérer, non pas le symptôme comportemental, mais uniquement la personne qui en souffre. Pourquoi ne parvient-t-elle pas à vivre sans ce rituel chronophage qui ne la rend pratiquement disponible pour rien d’autre, ou à peine ?

La question est résolue aujourd’hui au travers de l’explication psychologique que les spécialistes ont donnée sous le nom de trouble de l’attachement (que le psychanalyste Bernard Golse a renommé pulsion d’attachement).

 

Boulimie hyperphagie 

Boulimie hyperphagie et pulsion d’attachement (1)

 

Si la plupart des enfants parvient à se détacher du parent d’attachement pour se construire une identité propre, certains en sont incapables et vivent le détachement comme une souffrance ou un déni, et pourront développer plus tard une addcition, telle que, par exemple la boulimie hyperphagie. On voit souvent parmi les gens qui consultent des personnes qui ont eu une adolescence très heureuse avec une apparente indépendance, de très bons résultats scolaires, des relations sociales paraissant légères et fluides, et qui néanmoins sont dans le prolongement de l’univers parental et n’ont pas construit réellement leur propre univers. Et cela va compliquer beaucoup leur vie à partir de l’adolescence. Ceux qui ne sont pas dans le déni sont dans la souffrance et la dépression déjà bien avant l’adolescence. Les uns comme les autres ont besoin de s’autonomiser sur le plan affectif et de découvrir leurs propres repères pour construire leur identité, faute de quoi ils pourront développer une addiction, telle que la boulimie hyperphagie par exemple.

 

Boulimie hyperphagie 

Boulimie hyperphagie, une problématique d'identité

 

C’est à cela que doit servir la psychothérapie avec des personnes qui souffrent d’addiction, comme par exemple de boulimie hyperphagie : les aider à découvrir leur propre identité. Cela ne se fait pas en essayant de comprendre le passé ni en faisant des théories intelligentes sur les supposées causes des souffrances mais en observant ce qui se passe ici et maintenant dans  la relation avec le psy,  ainsi qu’avec les participants si c’est un groupe de psychothérapie, et comment on rejoue avec eux sa pulsion d’attachement ?

 

Boulimie hyperphagie 

La mentalisation : une approche idéale pour la boulimie hyperphagie

 

Le monde de la psychiatrie française aujourd’hui commence à s’intéresser de très près à Peter Fonagy, docteur en psychologie  anglo-saxon qui est également psychanalyste et qui a élaboré une approche pour faire ce genre de travail : la mentalisation. « La mentalisation, jusqu'à présent est utilisée pour les troubles de la personnalité borderline, mais elle va aussi comme un gant à la boulimie hyperphagie. Elle implique simplement de porter attention aux états mentaux chez soi-même et chez autrui, en particulier lorsque nous tentons d’expliquer des comportements. Les convictions, les désirs, les sentiments et les pensées, que nous en soyons conscients ou non, déterminent nos actions et également nos addictions, parmi lesquelles la boulimie hyperphagie. » («Mentalisation  et Trouble de la Personnalité Limite » Anthony Bateman et Peter Fonagy, éditions Deboeck).

 

Boulimie hyperphagie 

Quand la boulimie hyperphagie commence à se calmer

 

Mais pour en revenir directement à mon sujet de départ, j’ai observé au cours de mon expérience clinique que certaines addictions sévères peuvent se prolonger un temps plus ou moins longtemps chez une personne, avant de disparaître, sous une forme moins sévère, après une psychothérapie centrée sur la personne et utilisant la mentalisation.

Beaucoup de gens ont une addiction plus ou moins sérieuse qui entrave plus ou moins leur santé ou leur vie relationnelle sans que cette addiction soit ce que je considère comme sévère, parce qu’ils réussissent malgré tout à vivre avec, sans qu’elle ne prenne toute la place, comme la toxicomanie, l'alcoolisme ou la boulimie hyperphagie. 

 

Boulimie hyperphagie 

La boulimie hyperphagie sur la voie de la guérison

 

Il y a des  addicts à la nourriture, au tabac, à l’alcool, aux drogues, à la boulimie, à la boulimie vomitive, à la boulimie hyperphagie ou à certains comportements, qui malgré l’addiction, prennent néanmoins du plaisir à leur vie familiale et ont le sens des nuances. Pour ceux-là, ce n’est pas du Tout-ou-Rien dans leur vie affective et sociale et elles ne sont pas totalement entravées par leur addiction.

J’ai remarqué que c’était le cas par exemple des personnes qui ont une boulimie vomitive ou une boulimie hyperphagie et qui, en cours de psychothérapie, commencent à découvrir «  qui habite dans leurs chaussures » (je reprends là l’expression d’une de mes patientes qui témoigne dans le film Boulimie et Thérapie et qui disait qu’elle ne savait pas qui habitait dans ses chaussures avant la psychothérapie de groupe)[2].

En cours de psychothérapie, la boulimie hyperphagie peut très bien continuer un temps, sans rester sévère. C’est-à-dire que l’on garde encore temporairement des rituels comportementaux qui ont pour fonction d’apaiser, mais dont on n’est plus totalement esclave. On peut passer ses journées sans penser sans cesse à la nourriture, on peut découvrir des vrais moments de partage avec les autres sans jouer un rôle, sans se sentir moins que rien, en oubliant totalement son addiction. C’est parce qu’on peut l’oublier pendant de longs moments de la journée, sans être hyper stressé, que je dirais que cette addiction n’est plus une addiction sévère.

Ainsi j’ai observé qu’on peut très bien terminer une thérapie en continuant pendant un temps à avoir des comportements addictIfs apaisants sans qu’ils ne soient plus complètement destructeurs de santé,  de vie sociale et de vie affective.

 

Boulimie hyperphagie 

Les accès de boulimie hyperphagie moins intense

 

Je parlerai ainsi pour la boulimie hyperphagie, tout comme pour la boulimie vomitive, je parlerais de boulimie de survie et de boulimie de confort. La boulimie de survie est impérative, elle ne souffre aucun délai. Tout s’arrête : le temps, la capacité de faire quelque chose… imposant de rompre l’activité en cours. La boulimie de confort est une boulimie qui s’impose elle aussi, mais peut être différée dans la journée si la personne est occupée par quelque chose qui lui plaît.

Je pense utile de rappeler aux personnes qui commencent à s’en sortir, que si elles ont encore des comportements dysfonctionnels avec la nourriture, elles ne sont plus dans une addiction sévère,

et avec le temps, le comportement va se réguler et disparaître. avec la nourriture se réguler et disparaisse.

 

Boulimie hyperphagie 

Quand la boulimie hyperphagie commence à disparaître

 

C’est le cas de la jeune femme que je vous présente en vidéo[3] et qui au moment d’un groupe s’inquiète de ne plus avoir autant envie de manger qu’avant. Comme elle sait que l’addiction est utile pour ne pas déprimer, et que son addiction est en train de diminuer, elle redoute la dépression.

Son inquiétude fait sens parce que lorsque la boulimie hyperphagie commence à devenir moins intense au cours de la construction identitaire, elle disparaît avant que tout ne soit construit, et il arrive souvent que des gens passent alors par une période dépressive. Mais il ne faut surtout pas s’inquiéter. Au fur et à mesure de la construction de l’identité et des repères environnementaux, le passage dépressif finira par n’être qu’un passage très vite oublié.

Si vous qui lisez cet article, vous êtes de ceux et celles qui sont passés par l'étape d'une boulimie hyperphagie moins sévère. Merci de partager avec nous, dans les commentaires, votre expérience. Je pense que cela rassurera beaucoup les gens qui sont encore dans un comportement rituel avec la nourriture, sans être vraiment encore dans l’addiction sévère à celle-ci.

 

Boulimie hyperphagie 

Devenir philosophe par nécessité

 

Sans perdre de vue que même si le boulimie hyperphagie disparaît ou s'atténue en cours de thérapie, il vous reste à persévérer dans le travail assidu de la construction du soi et des échanges relationnels afin de réussir à se sentir enfin dans sa peau et bien parmi les autres. Et comme vous êtes de personnes hypersensibles puisque vous avez eu une boulimie hyperphagie sévère, c’est toute votre vie que vous serez obligé de pratiquer la mentalisation que vous aurez apprise en psychothérapie, c’est-à-dire mettre en doute ce que vous croyez comprendre de l’autre et de vous-même, pour ne pas interpréter systématiquement la réalité à partir de vos premières impressions à fleur de peau. Par exemple quand vous vous sentez blessé par l’autre, il ou elle ne l’a peut-être pas fait exprès. Par conséquent inutile de le punir en boudant ou en l’agressant : contrairement à vos souhaits, dans un relationnel équitable, il ou elle n’est pas à votre service, même dans la relation parent enfants, même dans la relation amoureuse, etc…

 

Découvrez nos articles sur la thématique "Hyperphagie et boulimie" :

[1] En 2010 je tentais d’expliquer le trouble de l’attachement dans cet article https://www.boulimie.fr/articles/troubles-de-la-personnalite/les-causes-de-la-boulimie qui était illustré par la vidéo d’une conférence passionnante et très claire de Boris Cyrulnik https://www.boulimie.fr/video-boulimie/video-du-mois/video-attachement

[2] « Boulimie et Thérapie »

https://www.boulimie.fr/video-boulimie/boulimie-et-therapie

[3] Vidéo d’une jeune femme qui, dans le cadre d’un groupe, s’inquiète de ne plus avoir autant besoin de faire des boulimies. https://youtu.be/5QvOT66yBwQ

Commentaires  

+1 #4 Aurélie 27-08-2019 19:33
Etre hypersensible pour moi ce n'est pas toujours facile à vivre même en travaillant sur soi , avoir l'esprit et le cœur léger ce n'est pas simple quand on a un tempérament hypersensible car je prend facilement tout à cœur. Mais c'est aussi une richesse, une intensité de vie, c'est vrai que ça demande des efforts de mentalisation, mais on en ressors plus riche dans le sens que ça m'a permis de créer de vrai relation, riche et profonde authentique avec autrui et avec soi-même!
Répondre
+1 #3 Aurélie 27-08-2019 19:26
Merci Catherine Hervais pour vos articles qui m’ont aidé à avancer dans la bonne direction . La mentalisation m'a beaucoup aidé à prendre du recul au niveau émotionnelle pour m'apaiser et me protéger en me permettant de faire la part des choses entre ce qui m'appartient et ce qui appartient à autrui (émotions, croyences..). Bien sûr, ça ne sait pas fait du jour au lendemain, le cheminement s'est fait petit à petit sur plusieurs années, avec parfois des retombés (rechute, crise de boulimie, dépression), mais à chaque fois, j'ai eu l'impression que je retombais moins bas et que j'étais plus armé pour me relever et qu'on peut tirer un enrichissement de nos phase dépressive pour essayer de se trouver soi-même.
Répondre
+5 #2 l auteure de l article 16-08-2019 19:21
Oui la légèreté est possible mais c'est tout un travail de Mentalisation pour l'acquérir. Plutôt que de ruminer ses pensées négatives on peut ruminer des choses utiles : "Il m'a mal parlé, mais son agressivité était-elle dirigée contre moi ?" Et là on se répond "non c'est pas contre moi puisque j'ai le droit d'être comme je suis même si ça ne lui plaît pas"... Toutes ces ruminations philosophiques sont utiles pour acquérir la légèreté. Et un jour après des années de travail ,c'est la récompense !
Voyez vous, je pense que c'est comme l'art. Au début en musique, on fait énormément de fausses notes et avec le temps on joue comme un Dieu et tout a l'air facile... Je pense que vive peut être un art, qu'il y a des règles, pas celles qu'on vous apprend petit, mais celles que vous découvrez petit à petit en fonction de vos goûts de vos dégoûts, et tout cela bien sûr sans vouloir de mal à autrui.
Répondre
+2 #1 Marion 16-08-2019 19:05
Je me retrouve tout à fait dans cet article. En particulier sur la question de l'attachement.
Je me demande si un jour, on peut vraiment arriver au point de non retour. C'est à dire qu'on a réussi à tenir une assez longue période de temps sans faire de crise, sans péter les plombs avec les gens.... bref sans ruiner tous ses efforts pour se considérer enfin comme "guérie". J'ai parfois tristement cette sensation qu'en tant que personnes hypersensibles, nous sommes condamnées à justement analyser et mentaliser nos comportements et pensées toutes notre vie... Ne jamais connaitre la légèreté. Par exemple, dire un mot de travers et ne pas ressentir le besoin de se punir immédiatement. Avez-vous parfois aussi ce sentiment? Et même si vous allez mieux, pouvez dire qu'il vous arrive de vous sentir légère?
Répondre