Manque de confiance en soi

Cela n’apparaît généralement pas dans leurs rapports sociaux dans lesquels elles semblent être totalement dans l’ouverture à l’autre et peuvent avoir l’air très sûres d’elles-mêmes, mais cela devient très net dès qu’elles se retrouvent dans un univers plus intime.

Le DSMIV, manuel diagnostique et statistique qui sert de référence pour les psychiatres américains en ce qui concerne les troubles mentaux, et sur lequel s’appuie la psychiatrie cognitivo-comportementale hospitalière de la boulimie, donne le manque d’estime de soi parmi les principaux critères diagnostiques de la boulimie. L’importance excessive accordée à la forme et au poids de leurs corps par ces personnes serait déterminante pour la faillite de l’estime de soi.

{xtypo_quote_right}D’où vient le manque de confiance en soi ? Pour une grande majorité de personnes boulimiques, il n’y a pas de raison apparente. {/xtypo_quote_right} Dans cette logique, la thérapie cognitivo-comportementale de la boulimie incorpore souvent au traitement une approche corporelle avec des activités comme la danse, des ateliers de « relookage  » ou du yoga, pour apprendre aux boulimiques à se familiariser avec leur corps et à l’aimer.

Le manque de confiance en soi vient de la toute première enfance

Si le manque de confiance en soi est lié aux rondeurs et au poids, on peut s’interroger sur l’origine du manque de confiance en soi des boulimiques vomisseuses minces.

Le regard psychanalytique, quant à lui, va au-delà du discours « manifeste  » des personnes boulimiques et fait remonter le manque de confiance en soi à un échec relatif aux processus d’intériorisation des premières relations de l’enfant et de son environnement. Bien avant l’adolescence, bien avant que l’enfant ne soit préoccupé par son corps, il y aurait déjà des signes avant-coureurs. On observe que, bébé déjà, ces personnes peuvent sourire pour que maman ne s’en aille pas. Plus grandes, les unes peuvent obtenir de très bons résultats à l’école, les autres ne pas parvenir à se concentrer suffisamment pour réussir, mais les unes comme les autres sont souvent des enfants « trop gentils « , toujours attentifs à faire plaisir, comme s’ils avaient quelque chose à prouver pour se faire apprécier. Plus tard, à l’adolescence, faire plaisir ne suffit plus. On se sent obligé de devenir réellement soi-même, on ne peut plus vivre uniquement pour plaire à l’autre. On ne peut plus se laisser habiter par la vie (et l’avis) des parents ou des autres.

On ne peut pas se positionner en tant qu’être autonome

On a besoin de se positionner, de montrer qui on est. Et c’est alors que le bât blesse. Au moment où il est nécessaire de devenir adulte les personnes boulimiques ne se sentent pas exister vraiment. Comme toutes les personnes d’ailleurs qui ne peuvent pas vivre sans une addiction, les boulimiques semblent avoir raté cette étape de la croissance affective qui apporte la tranquillité, l’autonomie, la confiance en soi-même et en l’autre. Dans cette logique bien sûr, les cours de danse ou les ateliers de « relookage  » ne changeront pas grand chose à l’image que la personne boulimique à d’elle-même. Une psychanalyse sur plusieurs années s’imposerait s’il était possible de faire une analyse avec des personnes affectivement aussi carencées. Mais il se trouve que les personnes boulimiques ont généralement un trouble de l’identité si profond, si « archaïque « , que la psychanalyse, dans sa manière habituelle de fonctionner (association libre, interprétation, neutralité du psychanalyste) n’est pas adaptée ?

Réassurer le petit enfant qui tremble à l’intérieur de l’adulte

Reste enfin les nouvelles psychothérapies qui, si elles n’oublient pas de prendre en compte le regard psychanalytique pour comprendre, vont proposer pour traiter, une autre approche que celle de la neutralité du thérapeute. Plus attentif au discours émotionnel qu’au discours intellectuel, le psychothérapeute cherche le « petit enfant  » chez la personne et, dans une attitude généralement très empathique, va proposer au « petit enfant  » dans la personne d’exprimer ses frustrations, ses peurs, ses demandes. Au cours de la thérapie, la partie « petit enfant  » pourra prendre de la maturité, de la confiance en soi et réussir à établir avec les autres un début de relation authentique.

Le « faux-self » de Winnicott

Si la psychothérapie semble être l’approche la plus ajustée pour la personnalité affectivement carencée des boulimiques, elle devra tenir compte de ce que Winnicott, pédiatre psychanalyste, a appelé le « faux-self « . Les boulimiques savent très bien jouer à « faire semblant « , parfois avec bonne foi d’ailleurs, et partir dans des discours intellectuels ou rationnels, intéressants certes, mais éloignés de ce qu’elles sont au fond d’elles-mêmes, loin de leur émotion authentique. A l’image des psychothérapies qui se pratiquent avec les alcooliques ou les toxicomanes, la psychothérapie des personnes boulimiques aura avantage à être confrontante.

Catherine Hervais

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